Le 11 décembre 2019, Edouard Philippe, ancien Premier Ministre, annonçait les grandes lignes de la réforme des systèmes de retraite. Cette annonce avait provoqué de nombreux remous dans le débat public, mais fut stoppée dans son élan du fait de la crise sanitaire liée à la Covid-19. Le gouvernement avait manifesté son envie irrépressible d’adopter cette réforme en ayant recours à l’article 49.3 de la Constitution et faisant passer ce projet sans vote de l’Assemblée nationale. Récemment, en avril 2021, Bruno Le Maire, ministre des Finances, affirme de nouveau que « la France a besoin d'une réforme des retraites ». Le projet de réforme immobilisé par le confinement semble ainsi toujours inscrit à l’agenda social du gouvernement.
Votre avocat en sécurité sociale à Paris vous propose de revenir sur les principaux points du projet de réforme.
Le système prévu par la
réforme se baserait sur un
nombre de points accumulés durant la carrière de l’intéressé. En fonction du
nombre de points acquis et de la valeur du point, il serait alors possible de déterminer le montant de la
pension de vieillesse. Une première observation peut être émise à ce sujet. Le montant de la
pension est susceptible de varier en fonction de valeur du point. Sur cette interrogation, le gouvernement a annoncé que sera appliquée une règle d’or selon laquelle la valeur du point ne pourra pas baisser. De prime abord, la réforme projette alors un maintien du niveau des pensions.
Toutefois, ce
système par points est à conjuguer avec la mise en place
d’un âge pivot. Une
décote ou surcote sera alors appliquée selon l’âge de départ à la
retraite du travailleur. Concrètement, cet âge pivot est une incitation à quitter la vie active le plus tard possible. La prospection de la surcote devrait fonctionner comme un levier puisque le travailleur qui choisit de partir à la
retraite après cet âge profite d’une
majoration de sa
pension de retraite. Inversement, si l’intéressé atteint l’âge légal de départ et choisi de quitter la vie active, une décote lui est alors appliquée. Il s’agit en quelque sorte d’un système de bonus/malus.
Si l’âge légal de départ à la
retraite reste fixé à
62 ans, le gouvernement se réserve le droit de faire reculer l’âge pivot. De cette manière, un travailleur peut, selon l’âge auquel il prévoit de partir à la
retraite, subir une baisse de la valeur du point en subissant la décote. Cette décote s’appliquerait pour toute la durée de sa
retraite et le rapport Delevoye prévoyait une diminution de 5% par année.
Ainsi, un travailleur choisissant de partir à la retraite à 62 ans se verra frapper d’un malus de 10%.
Malgré tout, ce système par points se veut tout de même fidèle au
système par répartition. Dans un tel système qui repose sur un effort intergénérationnel, ce sont les actifs qui paient les pensions des retraités. S’agissant des majorations pour famille nombreuse, le projet prévoit une majoration à compter de la naissance du
premier enfant de 5%. A ce titre, 2.5 % sont obligatoirement attribués à la mère et l’autre moitié peut l’être au conjoint tout comme à la mère. Le système actuel prévoit lui l’attribution d’une majoration pour famille nombreuse à partir de la naissance du 3
ème enfant. Dans ce cas-là, la
pension de retraite des deux parents augmente alors de 10%. Toutefois, ce système profite plus aux hommes étant donné que statistiquement les hommes sont bénéficiaires d’une pension plus élevée. La majoration est donc stratégiquement appliquée sur les droits à la retraite de l’homme.
Actuellement, les parents de trois enfants profitent alors d’une majoration de 10% chacun, soit un total de 20%. Tandis que dans le système universel, la majoration relative à trois naissances n’atteindra que 15%. S’il est possible de saluer le fait que par défaut, en l’absence de choix des parents, ces points de majoration sont attribués à la mère, il est également possible de formuler le même constat que pour le système actuel. Stratégiquement, le même choix sera fait, celui d’attribuer les points au parent qui a la
pension plus élevée. Outre cela, un travailleur s’occupant d’un enfant ou d’un adulte handicapé, d’une personne malade ou d’une personne âgée en situation de perte d’autonomie va acquérir des points dits de solidarité pour ces périodes.
Le projet affiche ainsi l’objectif de prendre en compte l’impact sur la carrière des parents de l’arrivée et de l’éducation d’enfant, mais également les périodes d’interruption et de réduction d’activité que peut rencontrer un travailleur au cours de sa carrière. En effet, le
projet de retraite prévoit la prise en compte des périodes de
congé maternité,
congé paternité, congé maladie, congé en cas d’invalidité,
accident du travail ou
maladie professionnelle etc… Ces périodes-là, dès lors qu’elles sont indemnisées, donnent lieu à
l’attribution de points dits de solidarité.
Ce qu’il convient de retenir également du système actuel est qu’il prévoit de prendre en compte le
s 25 meilleures années du travailleur alors que le
projet de réforme prévoit de prendre en compte
l’intégralité de la carrière du travailleur. Ainsi, il ne sera plus possible de déduire une « mauvaise année » pour le calcul de ses droits à la retraite.
Statistiquement, les femmes n’ont pas des carrières aussi linéaires et longues que les hommes. Ces dernières sont plus touchées par la précarité, de courtes carrières, de plus grandes et multiples interruptions de carrière. Les normes sociales leur attribuent encore notamment l’éducation des enfants ce qui engendre de plus grandes périodes d’inactivités. Ainsi, sous le nouveau système, les femmes viennent encore à y perdre. Si on prenait en compte les 25 meilleures années de la carrière d’une femme, celle-ci pourrait amortir la réduction de sa
pension. Désormais, prendre en compte l’intégralité de la carrière implique nécessairement qu’une année « mauvaise » soit prise en compte et fasse ainsi considérablement baisser le montant de leur future pension.
Le
projet de retraite semble établir une
discrimination envers les femmes. Bien que cette discrimination soit indirecte, elle n’a pas échappé à bon nombres d’experts qui ont déjà formulé des réticences et oppositions à ce propos. L’attribution de points de solidarité ne suffira sans doute pas à réduire les inégalités existantes.