La situation des travailleurs handicapés a conduit le législateur à ouvrir plus largement l’accès de ces derniers au milieu du travail. En effet, la
loi du 11 février 2005, confortée par la loi du 28 juillet 2011 portant diverses dispositions relatives à la politique du
handicap, a renforcé les obligations des employeurs
dans un objectif de favoriser l’accès et le maintien des
personnes handicapées en milieu ordinaire de travail. Le médecin du travail, les partenaires sociaux ou encore le
CSE sont investis de missions particulières en la matière. De plus, la loi «
Avenir » du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel renforce ce dispositif, et oriente la politique en faveur des personnes handicapées vers une obligation renforcée d’emploi direct, en supprimant certains dispositifs qui ne conduisaient pas à des embauches effectives en entreprise.
Mais qu’est-ce qu’un travailleur en situation de handicap ?
Au regard de l’ Article
L114 du Code de l’action sociale et des familles, «
constitue un handicap, au sens de la présente loi, toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant. ». Le handicap peut être moteur, psychique, mental, sensoriel ou consister en une maladie invalidante. Dès lors qu’une personne atteint de
handicap entre dans l’emploi salarié, cette dernière devient travailleur handicapé au sens de l’ Article
L5213-1 du Code du travail. Est ainsi considéré comme tel «
toute personne dont les possibilités d'obtenir ou de conserver un emploi sont effectivement réduites par suite de l'altération d'une ou plusieurs fonctions physique, sensorielle, mentale ou psychique ».
Quelles sont les
obligations de l’
employeur au regard de l’intégration effective des
travailleurs handicapés à ce jour ? Le Cabinet ZENOU, d’
avocat en droit du travail à Paris 20
ème, vous délivre les informations essentielles que vous devez avoir à l’esprit s’agissant des obligations
de votre employeur à votre égard, si vous faites partie de la catégorie des travailleurs
reconnus handicapés.
Il est important de connaitre d’abord les secteurs concernés par l’obligation effective d’emploi des travailleurs handicapés (I) avant de voir les différentes obligations imputées à l’employeur
en vue des aménagements nécessaires à la garantie d’un meilleur équilibre et d’une meilleure sécurité pour les salariés handicapés (II).
I. Quelles sont les structures concernées par l’obligation effective d’emploi des travailleurs handicapés ?
- L’obligation d’emploi dans les entreprises d’au moins 20 salariés
L’obligation d’emploi s’impose à tous les
employeurs occupant au moins 20 salariés (Article
L5212-1 Code du travail) y compris les employeurs publics. Depuis le 1
er janvier 2020, le seuil d’effectif de 20 salariés
s’apprécie au niveau de l’
entreprise et non plus établissement par établissement dans le cas des entreprises, comportant plusieurs établissements multiples, comme c’était le cas auparavant (Article
L5212-3 Code du travail). De plus, depuis cette même date, tous les employeurs, même s’ils comptent moins de 20 salariés doivent déclarer l’effectif total, des bénéficiaires de l’obligation d’emploi des
travailleurs handicapés qu’ils emploient.
- L’obligation d’emploi dans la proportion de 6% de l’effectif de l’entreprise d’au moins 20 salariés
Tout employeur, dont les établissements publics industriels et commerciaux, d’au moins 20 salariés est soumis à l’
obligation d’emploi de 6% de travailleurs handicapés sur son effectif total (Article
L5212-1 Code du travail). L’entreprise qui occupe au moins 20 salariés au moment de sa création dispose d’un délai de 5 ans maximum pour respecter son obligation
d’emploi
(Article
L5212-4 Code du travail). Quelques évolutions ont été amenées depuis le 1
er janvier 2020, selon les dispositions contenues dans la loi Pacte. En effet, le taux de 6%, qui est fixe depuis 1987, pourra être réévalué tous les 5 ans, en référence à la part des bénéficiaires de l’obligation d’emploi dans la population active et à leur situation au regard du marché du travail, après avis du conseil national consultatif des
personnes handicapées.
Le nombre de bénéficiaires à employer est déterminé en appliquant le pourcentage de 6% à l’effectif total de l’entreprise, quel que soit le nombre d’établissement. Les employeurs sont tenus à une obligation
de résultat qui est destinée à les responsabiliser. En effet, depuis le 1
er janvier 2020, seul l’emploi direct de
travailleurs handicapés permet de satisfaire l’obligation. L’Article
D5212-3 du Code du travail donne des règles de calcul permettant de voir si l’objectif est atteint pour les entreprises. Ainsi, l’effectif des bénéficiaires de l’
obligation d’emploi se chiffre en prenant en compte l’ensemble des travailleurs
mentionnés à l’Article
L5212-13 du Code du travail (travailleurs reconnus handicapés par la commission des droits et de l’autonomie des
personnes handicapées, victimes d’accidents du travail ou de
maladies professionnelles ayant entrainé une incapacité permanente au moins égale à 10% et titulaire d’une rente, certains titulaires d’une
pension d’invalidité …), quelles que soient la durée et la nature de leur contrat, y compris les stagiaires, les personnes en période de mise en situation en milieu professionnel et les personnes mises à dispositions par les entreprises de travail temporaire ou les groupements d’employeurs.
II. Quelles sont les obligations propres de l’employeur vis-à-vis des travailleurs en situation de handicap ?
- L’obligation effective d’emploi de travailleurs handicapés
Les employeurs au sein de l’
entreprise sont tenus à une obligation
de résultat. Depuis le 1
er janvier 2020, seul l’
emploi de
travailleurs handicapés ou de toute personne mentionnée à l’Article
L5212-13 du Code du travail quelles que soient la durée et la nature de son contrat, permet de satisfaire cette obligation (Article
L5212-2 Code du travail). Il apparait en vertu de l’Article
L4121-1 du Code du travail fixant le régime général de l’
obligation de sécurité de résultat de l’
employeur, en matière de santé, sécurité et conditions de travail que «
L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. L’employeur est doté d’une obligation générale de sécurité à l’égard de ses salariés handicapés. Parmi ces mesures, il y figure des actions de prévention de risques professionnels, des actions d’information et de formation ».
Avant les modifications apportées au 1
er janvier 2020, il existait et existe encore plusieurs manières pour l’
employeur de s’acquitter de son
obligation d’
emploi effectif des
travailleurs handicapés, telle que celle de faire application d’un accord agréé qui prévoit la mise en œuvre d’un programme annuel, ou pluriannuel en faveur des travailleurs handicapés pour une durée maximale de 3 ans renouvelable une fois. Un tel accord peut être de branche, de groupe, d’entreprise ou d’établissement (Article
L5212-8 Code du travail). L’accord doit comporter :
- Un plan d’embauche en milieu ordinaire.
- Un plan de maintien de l’emploi dans l’entreprise (Article R5212-12 Code du travail).
- Au choix un plan d’insertion et de formation professionnelle et/ou un plan d’adaptation aux mutations technologiques.
Enfin, l’
employeur peut s’acquitter de cette obligation par le versement au fonds de développement pour l’insertion professionnelle des handicapés, d’une contribution annuelle (Article
L5212-9 Code du travail).
- L’obligation de déclaration des travailleurs handicapés
Tout
employeur soumis à l’
obligation d’
emploi de travailleurs handicapés doit effectuer chaque année une déclaration, au sein de laquelle il indique l’effectif de son entreprise, le nombre de bénéficiaires du dispositif d’emploi, ainsi que les moyens alternatifs permettant de remplir l’obligation d’emploi. Depuis le 1
er janvier 2020, tout employeur
a l’obligation d’effectuer cette
déclaration, quel que soit son effectif (Article
L5212-1 Code du travail).
- La négociation obligatoire des entreprises sur la question des travailleurs handicapés
Dans les entreprises d’au moins 50
salariés, il est obligatoire d’engager une fois tous les 4 ans au moins, des négociations sur l’égalité professionnelle, entre les femmes et les hommes et la qualité de vie au travail (Article
L2242-1 Code du travail). La négociation sur le
handicap relève de la qualité de vie au travail (Article
L2242-17 4°, Code du travail).
Attention : Le fait pour l’
employeur de se soustraire aux obligations prévues par l’article
L2241-1 du Code du travail mentionné précédemment, relatives à la convocation des parties à la négociations et à l’obligation périodique de négocier sur les sujets prévus par le Code du travail, est puni d’un emprisonnement d’un an et d’une amende de 3750 euros.
- L’obligation d’aménagement et de maintien dans l’emploi des travailleurs handicapés
Un ensemble de mesures peut être prévus afin de garantir le meilleur équilibre pour les
salariés handicapés. Des aménagements matériels peuvent être effectués si le type de handicap, dont est atteint le salarié le nécessite. Ces mesures ayant un caractère impératif, prennent la forme d’adaptations ou encore de transformations de poste, devant être justifiées par des considérations relatives notamment à l’âge, à la résistance physique ou à l’état de santé physique et mentale des salariés.
Ces aménagements sont généralement préconisés par le médecin du travail en application de l’Article
L4624-1 du Code du travail. En ce sens, en vertu des obligations de l’employeur, ce dernier est contraint de respecter les recommandations médicales et ceci, quel que soit la nature de l’avis du médecin : aptitude ou inaptitude du
salarié handicapé (
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 19 décembre 2007, 06-43.918). Ainsi, il appartient à l’employeur
de justifier qu’il a effectivement procédé à l’adaptation du poste de travail de
travailleur handicapé, préconisé par le médecin du travail (
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 14 octobre 2009, 08-42.878).
Si l’
employeur récuse l’avis du médecin du travail, il commet un manquement à son obligation, assorti de paiement de dommages et intérêts au salarié lésé (
Cour de cassation, civile, Chambre sociale, 27 septembre 2017, 15-28.605). S’agissant de la situation du
travailleur handicapé, il est prévu par le Code du travail que «
L’employeur doit prendre en fonction des besoins, dans une situation concrète, les mesures appropriées pour permettre aux travailleurs handicapés d’accéder à un emploi ou de conserver un emploi correspondant à leur qualification, de l’exercer ou d’y progresser ou pour qu’une formation adaptée à leurs besoins leur soit dispensée (…) » (Article
L5213-6 Code du travail). Les mesures appropriées doivent être selon la Directive 2000/78/CE du 27 novembre 2000, «
des mesures efficaces et pratiques destinées à aménager le poste de travail en fonction du handicap ».
L’amélioration des conditions de travail des salariés handicapés peut se traduire par un aménagement des horaires. En effet, si cela lui est bénéfique, le travailleur handicapé peut profiter du télétravail dans des conditions assouplies (Article
L1222-9 Code du travail). Enfin, l’employeur ne peut maintenir son
salarié handicapé sur un poste inadapté. Au regard de son obligation
de sécurité de résultat, il lui appartient d’envisager un reclassement du salarié concerné (Article
R4225-6 Code du travail). En effet, le
Conseil de prud’hommes avait énoncé que «
l’employeur qui avait refusé de suivre les préconisations du médecin du travail pour aménager le poste d’une salariée reconnue travailleur handicapé a manqué à son obligation de sécurité de résultat, celui-ci ne rapportant pas la preuve de sa recherche d’aménagements du poste de travail » (
CPH de Saint Denis, 28 juillet 2017, RG n° F15/0246).
III. Quel tribunal compétent en cas de non-respect par l’employeur de ses obligations d’aménagement de poste du travailleur handicapé ?
Le refus par votre employeur de prendre ces mesures d’égalité de traitement et d’aménagement de poste (dans les limites imposées par la taille de l’entreprise, le coût des aménagements à supporter et les moyens dont elle dispose), peut être constitutif d’une discrimination au sens de l’Article
L1132-1 Code du travail. Si votre employeur
souhaite vous licencier du fait de votre maladie ou de votre
handicap, vous pouvez
saisir le Conseil de prud’hommes afin d’obtenir la
nullité de votre licenciement et le versement d’une indemnité réparant l’intégralité du préjudice subi et si vous le souhaitez, la réintégration dans l’entreprise.
Vous êtes
travailleur handicapé et vous estimez que votre
employeur ne respecte pas ses obligations en matière de maintien de l’emploi ? Vous suspectez être victime de discrimination au regard de votre état de santé ou de votre apparence physique ? Le
Cabinet Zenou,
avocat en défense des salariés à Paris 20
ème, vous délivre de précieux conseils, et vous accompagne tout au long de la procédure prud’homale.