Vous faites l’objet d’une décision de la CPAM qui vous octroi un taux d’IPP que vous estimez insuffisant ? Sachez que vous pouvez contester ce taux par les voies de recours amiables et le cas échéant en saisissant le Tribunal judiciaire du pôle social (depuis le 1er janvier 2019). Cet article vous fait le point sur la procédure à suivre pour contester le taux d’IPP.
I. Qu’est que le taux d’IPP ?
Tout d’abord, le
taux d’IPP se définit comme le taux d’incapacité permanente partielle (IPP) aussi appelé déficit fonctionnel permanent, est un pourcentage exprimant l’importance des séquelles qui subsisteront définitivement, et qui diminuent la capacité physique d’une personne qui a subi un accident. Ainsi que vous soyez victime d’un
accident du travail ou d’une maladie professionnelle, vous pouvez prétendre à l’octroi d’un taux d’IPP destiné à compenser, autant que possible les séquelles de cet accident ou de cette maladie professionnelle dans votre vie quotidienne. Il est à noter que ce taux vous est octroyé une fois que votre état est consolidé c’est-à-dire que vous êtes guéri ou en voie de guérison (stabilisation de votre état de santé).
Selon l'article
L.434-2 du Code de la sécurité sociale,
" Le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité".
Sachez également que vous pouvez tout de même solliciter de la
CPAM la réouverture de votre dossier en cas d’aggravation ou de nouvelles lésions suite à votre accident du travail ou de votre
maladie professionnelle. En tout état de cause, c’est le médecin conseil de la CPAM qui détermine si votre état de santé est consolidé ou non selon les éléments médicaux que vous lui soumettrez lors de la visite médicale. A partir de la date de consolidation fixée par le médecin-conseil, vous ne percevrez plus les indemnités journalières de la sécurité sociale dite IJSS.
Le
taux d’IPP vous permet d’avoir droit au versement d’une rente ou d’une somme forfaitaire en une seule fois selon le taux qui vous est attribué. Ainsi deux cas de figure se présentent :
- Votre taux est inférieur à 10% (entre 1% et 9%) : dans ce cas-là, vous percevrez en une seule fois une somme forfaitaire en fonction d’une grille préétablie qui prend en compte votre âge et votre situation socioprofessionnelle. On parle d’indemnité en capital.
- Votre taux est supérieur ou égal à 10% : dans cette hypothèse, vous pourrez alors prétendre à une rente jusqu’à votre décès. Cette rente vous sera versée trimestriellement selon que votre taux se situe entre 10% et 50%. Au-delà de 50%, vous pourrez prétendre à une rente mensuelle tout au long de votre vie.
A titre d'exemple le taux D'IPP inférieure à 10% est évalué de la manière suivante :
Montant de l’indemnité en capital versée selon le
taux d’incapacité permanente (au 1er avril 2020). Taux d’incapacité permanente montant de l’indemnité en capital :
Taux d’incapacité permanente Montant de l’indemnité en capital
1 % 418,96 €
2 % 680,96 €
3 % 995,08 €
4 % 1 570,57 €
5 % 1 989,64 €
6 % 2 460,85 €
7 % 2 984,21 €
8 % 3 560,36 €
9 % 4 188,62 €
Il convient de rappeler que la rente ou la somme forfaitaire est exonérée de CSG/CRDS.
II. Comment contester un taux d’incapacité ?
Il se peut que vous estimiez que le taux alloué par la CPAM est insuffisant ou pire encore que la
CPAM vous refuse le droit à un taux d’incapacité. Dans ce cas-là, pas de panique, il faut saisir dans un premier temps, la commission médicale de recours amiable dite
CMRA. C’est la première étape amiable à effectuer avant toute saisine au fond. A défaut de ce préalable obligatoire, votre recours pourrait être déclaré irrecevable par le Tribunal.
Attention, la CPAM a l’obligation de vous notifier la décision d’attribution du taux IPP par voie de recommandée avec accusé de réception en faisant apparaitre les voies de recours. A défaut, les délais ne courent pas et vous pouvez à tout moment saisir la commission médicale de recours amiable sans que l’on puisse vous opposer le délai de 2 mois.
Conformément à l’article
R142-8-5 du Code de la sécurité sociale,
« la commission médicale de recours amiable établit, pour chaque cas examiné, un rapport comportant son analyse du dossier, ses constatations et ses conclusions motivées. Elle rend un avis, qui s'impose à l'organisme de prise en charge. Le secrétariat transmet sans délai son avis à l'organisme de prise en charge et une copie du rapport au service médical compétent et, à la demande de l'assuré ou de l'employeur, à l'assuré ou au médecin mandaté par l'employeur lorsque celui-ci est à l'origine du recours. L'organisme de prise en charge notifie à l'intéressé sa décision. L'absence de décision de l'organisme dans le délai de quatre mois à compter de l'introduction du recours préalable, vaut rejet de la demande ».
Ainsi sans réponse de la
CMRA à compter du recours préalable, l’assuré peut considérer qu’il s’agit d’un rejet implicite qui lui ouvre la possibilité de saisir le Tribunal judiciaire pôle social dans un délai de 2 mois.
Exemple : la CPAM vous a notifié un taux IPP le 1er mars 2020 (cachet de la poste faisant foi), vous avez contesté en saisissant la commission médicale de recours amiable le 19 avril. Pour rappel, vous disposiez jusqu’au 1er mai 2020 pour introduire un recours amiable devant la CMRA. Sans réponse de la CMRA dans un délai de 4 mois à compter du recours préalable, en l’espèce le 19 avril soit jusqu’au 19 août 2020, vous disposez de deux mois supplémentaires à compter du 19 août 2020 pour saisir le Tribunal judiciaire pôle social soit jusqu’au 19 octobre 2020 au plus tard.
Bien entendu, il est vivement conseillé de ne pas attendre la limite du délai pour éviter toute contestation de la CPAM. Il faut agir en amont bien avant la fin du délai légal prévu par les textes du Code de la sécurité sociale.
- Comment saisir le Tribunal judiciaire pôle social ?
La saisine s’effectue par lettre recommandée avec AR dans les deux mois suivant la date de réception de la décision ou dans les quatre mois du rejet implicite de la CMRA. Elle doit être adressée au secrétariat du tribunal et doit obligatoirement contenir :
- les noms, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur ;
- la dénomination et l’adresse de l’organisme ayant pris la décision contestée ;
- l’objet de la demande ;
- si nécessaire, le nom et l’adresse du médecin que vous désignez ;
- un exposé sommaire des motifs de la demande ;
- une copie de la décision contestée.
À noter : Vous avez la possibilité de compléter un formulaire
CERFA n°15980*03. L’assistance d’un
avocat spécialisé en droit de la sécurité sociale est vivement recommandée pour ce type de contentieux et défendre au mieux vos intérêts.
III. Comment se déroule l’audience devant le Tribunal judiciaire pôle social ?
Tout d’abord vous devez dans un premier temps obtenir le rapport médical du médecin conseil de la
CPAM sur lequel il a établi son rapport pour déterminer le taux d’IPP. Compte tenu du secret médical, vous devez solliciter vous-même ce rapport en écrivant directement à la
CMRA ou passer par le biais de votre médecin-traitant qui se chargera de récupérer ledit rapport. Le tribunal statue sur une procédure dite contradictoire où les pièces et écritures sont échangées en amont. Le respect du contradictoire implique que chaque partie doit avoir, connaissance de toutes les pièces et moyens de droit avant l’audience de jugement.
La procédure est néanmoins orale ce qui veut dire que vous pouvez faire valoir votre argumentation oralement devant le Tribunal en ayant préalablement communiqué l’ensemble de vos pièces à la
CPAM. Lors de cette audience, le Tribunal peut ordonner une
expertise médicale selon les pièces que vous aurez communiquées au Tribunal qui justifient ou non une revalorisation de votre taux et l’affaire sera renvoyée une fois que le rapport de l’expert sera rendu.
En tout état de cause, s’agissant un contentieux d’ordre médical, l’
expertise médicale peut être sollicitée par une des parties. A ce titre, il est important de vous faire assister par un médecin conseil qui pourra appuyer votre demande lors de l’
expertise médicale. Vous pourrez trouver un médecin sur le site de l’
ANAMEVA qui assurera que votre état de santé soit bien reconnu médicalement avec des médecins spécialistes du dommage corporel.
A l’issue de l’audience, l’affaire est mise en délibéré et le Tribunal rend un jugement qui est susceptible d’appel devant la Cour nationale de l'incapacité, et de la tarification de l'assurance des accidents du travail dite CNITAAT dont le siège se situe à Amiens. Cette Cour traite de l’ensemble des jugements rendus par les Tribunaux judiciaires pôle social de toute la France. L’appel est formé à peine de forclusion dans un délai de 1 mois à compter de la notification du jugement rendu par le Tribunal judiciaire pôle social.
A noter : La loi du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du xxie siècle supprime cette juridiction au plus tard le 1er janvier 2019. Toutefois, une ordonnance du 16 mai 2018 reporte cette suppression entre le 31 décembre 2020 et le 31 décembre 2022.
Cette procédure est parfois vécue comme complexe par les justiciables, et se faire assister d’un avocat vous assure la défense de vos intérêts et d’être indemnisé de l’intégralité de vos préjudices. En effet, le retentissement professionnel est à prendre en compte dans votre indemnisation, car à la suite d’un accident ou d’une maladie professionnelle, votre capacité de travail est malheureusement fortement réduite.
Maitre Johan Zenou, avocat en droit de la sécurité sociale à Paris, vous accompagne et vous défend en cas de contentieux que vous soyez salarié ou employeur sur l’évaluation du taux d’IPP.