L’entretien préalable au licenciement : quel comportement à adopter ?

L’entretien préalable au licenciement : quel comportement à adopter ?
Lorsqu’un employeur souhaite licencier l’un de ses salariés, il se trouve dans l’obligation de respecter une certaine procédure de licenciement, qui l’oblige à convoquer le salarié concerné à un entretien préalable conformément aux dispositions de l’article L.1232-2 du Code du travail :
 
« L’employeur qui envisage de licencier un salarié le convoque, avant toute décision, à un entretien préalable. La convocation est effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en main propre contre décharge. Cette lettre indique l’objet de la convocation. L’entretien préalable ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en main propre de la lettre de convocation. » 
 
L’entretien préalable est l’un des droits du salarié que l’employeur se doit de respecter dans le cadre d’une procédure de licenciement. Certaines formalités légales lui sont imposées et il se doit de respecter un processus très encadré. Cet entretien est également soumis au principe du contradictoire, qui est l’un des fondements de la justice française. De manière générale, ce principe permet à toutes les parties d’une procédure judicaire d’avoir connaissance de la procédure, d’avoir connaissance de l’ensemble des griefs discutés, d’avoir connaissance de toutes les pièces versées au dossier et de pouvoir débattre librement.

Dans le cadre de l’entretien préalable, le principe du contradictoire doit permettre au salarié de se justifier sur les griefs qui lui sont reprochés. En aucun cas l’entretien préalable ne doit servir aux fins de mener l’enquête comme il en a été jugé par la Cour de cassation dans un arrêt du 20 janvier 2016.
 
Du point de vue du salarié, l’entretien préalable au licenciement est souvent annonceur de mauvaise nouvelle. En pratique, bon nombre de ces entretiens conduisent au licenciement du salarié mais il n’est pas rare que les deux protagonistes de cette entrevue parviennent à trouver, un accord pour envisager soit la rupture amiable du contrat de travail du salarié soit la pérennité de celui-ci dans l’entreprise avec une simple sanction disciplinaire.
 
A travers cet article, Maître Johan Zenou, expert en droit du travail à Paris 20ème, vous détaille les modalités de la convention du salarié (I), puis vous explique s’il est obligatoire de se présenter à cet entretien (II) et vous délivre des conseils afin de préparer au mieux ce dernier (III) en vous expliquant son déroulement (IV).
 

I. Les modalités de la convocation du salarié à un entretien préalable au licenciement

 
Conformément aux dispositions issues des articles L.1232-2 et suivants du Code du travail, ce dernier exige d’accomplir certaines modalités dans le cadre de la convocation. En effet, de prime abord l’employeur qui envisage de licencier un salarié doit le convoquer à un entretien préalable avant toute décision. Cette convocation doit être effectuée par lettre recommandée ou par lettre remise en mains propres contre décharge. Il ne s’agit pas d’une formalité obligatoire, mais ce procédé permet d’éviter toute contestation sur la date de présentation et de retrait du courrier. D’autres moyens d’acheminement sont admis comme la convocation signifiée par huissier ainsi que la convocation par Chronopost, qui permet de justifier des dates d’expédition et de réception de la lettre. En revanche, une convocation orale (Cass. Soc, 26 mars 1992) ou par télécopie est irrégulière (Cass. Soc. 13 septembre 2009).
 
Lorsque le licenciement est envisagé pour un motif personnel non disciplinaire, aucun délai n’est imposé pour l’envoi de la convocation. En revanche, s’il est envisagé pour motif disciplinaire, la convocation doit être envoyée le plus rapidement possible et au plus tard dans les deux mois à compter du jour de la connaissance des faits par l’employeur. Il est impératif que la convocation précise l’objet, la date, l’heure et le lieu de l’entretien, et rappeler la possibilité pour le salarié de se faire assister. L’omission de l’une de ces mentions rend la procédure irrégulière, même si cela n’a pas empêché la tenue de l’entretien.
 
La convocation doit expressément préciser qu’une mesure de licenciement est envisagée. La mention des motifs n’est quant à elle pas obligatoire, sauf si des dispositions conventionnelles viennent en disposer autrement. Il est donc important pour tout salarié de vérifier si l’entièreté des modalités relatives au contenu de la lettre de convocation sont bien mentionnées. Si l’une d’elle a été omis, il vous sera possible de soulever l’irrégularité de la procédure.
 
Concernant la date de l’entretien, celui-ci ne peut avoir lieu moins de cinq jours ouvrables après la présentation de la lettre recommandée ou la remise en mains propres de la lettre de convocation (article L.1232-2 alinéa 3 du Code du travail). Le non-respect de ce délai, qui a pour but de laisser au salarié le temps de préparer sa défense et de rechercher une assistance, est une irrégularité de procédure. Même si cela émane de sa propre personne, le salarié est dans l’impossibilité de renoncer à ce délai (Cass. Soc. 28 juin 2005). Dès lors que vous recevez une convocation à un entretien préalable au licenciement, il vous est impossible de demander à ce que l’entretien ait lieu avant le délai de cinq jours ouvrables imposé par la législation.
 
L’entretien préalable doit généralement avoir lieu pendant le temps de travail du salarié qui doit être rémunéré comme du travail effectif. Il peut pourtant être fixé en dehors du temps de travail et des jours habituellement travaillés sans que cela ne constitue une irrégularité. Il est également de mesure que le lieu de l’entretien soit celui du lieu où s’exécute le travail ou au siège social de l’entreprise. Pourtant, il a déjà été jugé valable que l’entretien soit fixé dans un café en raison de l’indisponibilité des locaux de l’entreprise, à condition que cette circonstance n’empêche pas le salarié de s’expliquer sur la rupture envisagée (Cour d’Appel de Versailles, 17 octobre 1994). Il est également possible que l’entretien se déroule dans un lieu public mais il ne faut pas que cela ait un caractère vexatoire envers la personne du salarié.
 
En revanche, si l’entretien se déroule dans un lieu éloigné du lieu de travail habituel du salarié, ce dernier a droit au remboursement de ses frais de déplacement (Cass. Soc. 28 janvier 2005).
 

II. En tant que salarié, suis-je obligé de me présenter à l’entretien préalable au licenciement ?

 
Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il ne repose sur le salarié aucune obligation de se présenter à son entretien préalable, il est libre de choisir de s’y rendre ou non. Son absence ne sera jamais considérée, comme une faute qui pourrait lui être imputable. Toutefois, si le salarié ne se présente pas à l’entretien, l’employeur n’est pas tenu de reporter la date et à le droit de continuer la procédure de licenciement, sans même avoir reçu le salarié afin qu’il donne des explications sur les faits qui pourraient lui être reproché.
 
  • Quid du salarié qui ne peut se rendre à l’entretien en raison d’un arrêt de travail ?
 
En pratique l’absence de l’intéressé ne doit pas être mis à profit par l’employeur, pour échapper aux obligations légales qui lui incombent. Il ne doit pas, de manière intentionnelle, mettre le salarié dans l’impossibilité de se rendre à l’entretien.
 
Si la convocation est adressée au salarié déjà en arrêt de travail pour maladie, il semble approprié de lui accorder un délai plus long que la normale entre la convocation et l'entretien préalable, il convient de le convoquer aux heures de sortie de la Sécurité sociale en prenant en compte les temps de trajet entre son domicile et le lieu de l'entretien. Si le salarié qui a reçu sa convocation répond que son état de santé ne lui permet pas, de se rendre à l'entretien ou si la convocation et l’arrêt de travail ont été envoyés simultanément, deux possibilités sont envisageables :
 
  • Soit le report de l'entretien par la fixation d'une nouvelle date pendant l'horaire de sortie autorisé.
  • Soit l'envoi d'une lettre recommandée constatant l'absence du salarié à l'entretien lui indiquant les motifs pour lesquels son licenciement est envisagé et l'invitant à faire connaître ses observations en lui fixant un délai suffisant pour répondre.
 
Il paraît important de se présenter à son entretien préalable, car il se peut que votre présence et les explications données au cours cet entretien vous permettent d’éviter, le prononcé ultérieur d’un licenciement par l’employeur qui vous infligera, le cas échéant, une simple sanction disciplinaire voire qui ne vous infligera aucune sanction dans le meilleur des cas.
 

III. Comment préparer son entretien préalable ?

 
L’une des choses les plus importantes, et qui est fortement conseillé par les professionnels du droit, est de se faire assister. En effet, il est ouvert au salarié la possibilité de se faire assister par une personne de son choix appartenant au personnel de l’entreprise (article L.1232-4 du Code du travail). Cette faculté d’être assisté doit toujours être indiqué dans la lettre de convocation.
 
Attention, il s’agit bien de se faire assister par un membre du personnel de l’entreprise, il ne s’agit en aucun cas de se faire assister par un avocat car ce dernier n’a pas vocation à intervenir dans le cadre d’un entretien préalable au licenciement. Il sera plus en mesure d’intervenir successivement à l’entretien préalable en cas de contestation du licenciement par le salarié. L’assistanat du salarié au cours de l’entretien peut être effectuer par un représentant du personnel. S’il n’y a pas de représentants dans l’entreprise, le salarié peut demander à être assisté par un membre du personnel (un autre salarié par exemple) ou par un conseiller inscrit sur une liste établie par le préfet de chaque département.
 
Le rôle de cet assistant va être prépondérant : il va en effet agir en qualité de témoin et pourra faire état de tout ce qui s’est passé au cours de l’entretien préalable. Son témoignage constituera une preuve fondamentale des choses, qui ont été dite et empêchera l’employeur de sanctionner le salarié sur des griefs qui n’auraient pas été invoqués lors de l’entrevue. Le cas échéant, cela permettrait au salarié de soulever un vice de forme pouvant donner droit à réparation devant le Conseil de Prud’hommes ou une Cour d’Appel.
 
Pendant le déroulé de l’entretien, l’attitude à adopter est une attitude d’écoute car il appartient à l’employeur de relater les faits, qu’il vous reproche et qui pourrait justifier une mesure de licenciement ou de sanction disciplinaire. Il faut dès lors prendre acte de ce que l’on vous reproche sans pour autant reconnaître les faits. Si l’employeur vient à relater des faits peu précis ou qui vous paraissent erronés, il est important que vous lui demandiez des explications ou encore la communication des pièces justificatives prouvant ses dires.
 
Bon à savoir : à ce stade de la procédure, l’employeur n’a aucune obligation de vous fournir les justificatifs nécessaires au bien fondé du licenciement. Ce n’est qu’au cours de l’instance devant le Conseil de Prud’hommes qu’il devra fournir les éléments prouvant le bien fondé de son licenciement.
 
  1. Le déroulement de l’entretien préalable au licenciement
 
Il est important de connaitre le déroulement de l’entretien préalable car il suit une certaine logique contradictoire, conformément au principe. En effet, c’est à l’employeur de démarrer les débats en exposant l’ensemble des griefs qu’il a à votre encontre en précisant les circonstances de manière à donner un caractère réel et sérieux aux motifs invoqués pour ne pas tomber dans un licenciement abusif. Ensuite, vous devez faire part de vos observations sur chaque grief mentionné par votre employeur. Si certains griefs vous paraissent incorrects ou erronés, vous êtes en droit de demander des pièces justificatives qui pourront permettre à l’employeur de justifier ses dires et d’expliquer son interprétation.
 
Il n’est pas rare que sur des mêmes faits on puisse avoir des interprétations différentes. Si au cours du débat, chaque partie à une interprétation différente, ne vous inquiétez pas, les propos tenus par le salarié au cours de l’entretien ne peuvent, sauf abus, constituer une cause du licenciement. L’employeur ne peut fonder sa décision de licenciement sur un motif qui n’aurait pas été débattu au cours de l’entretien. Une fois que cette phase de discussion entre le salarié et l’employeur est terminée, ce dernier ne peut pas prendre sa décision à l’issue de l’entretien. La lettre de licenciement doit respecter un certain délai légal et un certain formalisme. En effet, l’employeur ne peut envoyer la lettre de licenciement avant un délai de deux jours ouvrables (article L.1232-6 du Code du travail). Il est également impératif que cette lettre soit envoyée par lettre recommandée avec accusé de réception et elle doit comporter de façon précise le ou les motifs invoqués par l’employeur.
 
Si le déroulement de l’entretien n’est pas conforme aux dispositions en vigueur ou que vous souhaitez contester la décision de votre employeur, le Cabinet d’Avocat Zenou, expert en droit social à Paris 20ème, conseille et assiste les salariés dans l’ensemble de vos démarches.

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