Attention à la manière dont vous vous débarrassez de vos factures, relevés bancaires et tout autre document important ! Il ne suffit pas de les jeter à la poubelle, une personne malveillante pourrait passer derrière vous et s’en servir pour commettre le
délit dit d’usurpation d’identité. De plus, dans l’ère du numérique, les informations personnelles susceptibles de nous identifier foisonnent sur la toile et constituent un risque d’être victime
d’usurpation d’identité.
Le
délit d’usurpation d’identité en tant que tel n’a pas été incriminé tout de suite. Auparavant, les magistrats devaient se reposer sur les formes particulières d’usurpation d’identité telle que l'usage d'un faux nom dans un acte public (Article
433-19 du Code pénal), l'usurpation d'état civil (Article
434-23 du Code pénal) et, enfin, l'indication d'un faux nom afin d'obtenir un extrait du casier judiciaire d'un tiers (Article
781 du Code de procédure pénale). Mais encore, certaines personnes pouvaient être incriminés sur le terrain de
l’escroquerie et autres infractions voisines. Toutefois, ces infractions ne permettaient pas d’atteindre tous les comportements frauduleux, ce qui créait un sentiment d’insécurité sur la répression.
De plus, les dangers et risques d’internet ne cessaient de gagner du terrain, renforçant ainsi la cybercriminalité. Ainsi, Omar Sy, auteur, artiste-interprète et comique avait été victime de la mise en ligne d’un faux profil Facebook en son nom et contenant certaines de ses informations personnelles en 2009. Il avait pu obtenir la condamnation de l’auteur de cette pratique frauduleuse au titre de son droit à la vie privée et à l’image, mais l’incrimination d’
usurpation d’identité, plus précisément sur le domaine du numérique aurait été la bienvenue à l’époque.
C’est dans ce contexte de dématérialisation et de cybercriminalité grandissante que la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (
LOPPSI) II du 14 mars 2011 dont la préparation connue de nombreux débats institua au sein du Code pénal le
délit d’
usurpation d’identité (Article
226-4-1 du Code pénal).
Est incriminé le fait d'
usurper l'identité d'un tiers ou de faire usage d'une ou plusieurs données de toute nature permettant de l'identifier en vue de troubler sa tranquillité ou celle d'autrui, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération. Il convient de décomposer les éléments constitutifs de cette incrimination (I), avant de s’intéresser au volet répressif (II) permettant à l’auteur d’un tel délit d’être puni et à la victime d’obtenir réparation (III).
I – Les éléments constitutifs de l’usurpation d’identité
L’élément matériel de ce
délit peut se décomposer en deux comportements alternatifs. En premier lieu, est incriminé le fait
d’usurper l’identité d’un tiers. Cette première forme du délit correspond au fait de s’attribuer l’identité d’une personne à laquelle on ne peut prétendre, usurper l’identité de quelqu’un qui n’est pas la nôtre.
En second lieu, est incriminé le fait de faire usage d’une ou plusieurs données de toute nature permettant d’identifier un tiers. Les données en question peuvent être le
pseudonyme, le numéro de Sécurité sociale, le numéro de compte bancaire, le numéro de téléphone ou encore l'adresse électronique d’un tiers. Il est aisé de comprendre comment à partir de ces données, une personne puisse être identifiée.
Cette seconde forme mérite d’être illustrée. La chambre criminelle de la Cour de cassation a pu confirmer l’efficacité de cette incrimination. En effet, un individu avait créé un faux «
site officiel » de la députée Rachida Dati, site reprenant la photo de cette dernière et présentant une grande similarité avec le site officiel. Toutefois, ce faux site servait à diffuser des commentaires insultants et diffamatoires et publier de faux communiqués sur les réseaux sociaux. Devant une telle supercherie, l’auteur a pu être reconnu coupable d’
usurpation d’identité (
Crim. 16 nov. 2016, no 16-80.207). En tout état de cause, le
délit d’usurpation d’identité suppose l’accomplissement d’un acte positif. Il ne saurait être constitué par une abstention de l’auteur.
Remarque : Assurez-vous de conserver à l’abri tous les documents qui pourraient servir à vous identifier. Si jamais vous décidez de vous débarrassez de certains de ces documents, prudence est de mise. Il vaut mieux investir dans une déchiqueteuse ou détruire du mieux que vous pouvez ces documents afin d’éviter d’éventuelles déconvenues.
Le
bulletin de paie est un document particulièrement important. En principe, il faut le conserver sans limite de durée puisqu’il peut vous servir à accomplir de nombreuses démarches. S’il vous est utile, le
bulletin de salaire est également un document qui concentre de nombreuses informations permettant de vous identifier (nom, adresse, numéro de sécurité sociale). S’il venait à tomber entre des mains malveillantes, il constituerait un outil de fraude pour l’
usurpateur.
Quant à
l’élément moral du délit d’usurpation d’identité, le comportement relevé doit être fait en en vue de troubler la tranquillité de la victime, ou de porter atteinte à son honneur ou à sa considération. Il est donc question de caractériser ce qu’on appelle un
dol spécial, dol qui se décompose également en deux parties dont l’une appelle à un rapprochement avec un autre délit. En effet, le fait de porter atteinte à l’honneur ou à la considération de quelqu’un est une formule que l’on retrouve s’agissant de l’incrimination de la
diffamation.
Remarque : Ainsi, le délit d’usurpation ne peut être caractérisé lorsque l’identité litigieuse a été attribuée au prévenu dans des circonstances indépendantes de sa volonté. Faute d’élément intentionnel, un prévenu, originaire des Comores qui était entré sur le territoire français sous une identité qui lui avait été donnée, indépendamment de sa volonté, par autrui, n’a pu être reconnu comme auteur du délit d’usurpation d’identité (Crim. 17 févr. 2016, no 15-80.211).
Il est assez évident qu’un individu qui usurpe votre identité pour contracter en votre nom des crédits à la consommation et faire peser le poids du remboursement de la dette sur vous, trouble votre tranquillité. Il suffit malheureusement d’une pièce d’identité (Carte d’identité, passeport etc…), d’une facture à votre nom qui fera office de justificatif de domicile, finalement de très peu de choses pour qu’un usurpateur fasse un usage frauduleux de vos informations et vous cause un préjudice. N’hésitez pas à vous rapprocher d’un
avocat en
droit pénal qui saura vous éclairer sur les dangers et risques de l’
usurpation d’identité.
II – La répression du délit
L’auteur du
délit d’usurpation d’identité encourt
un an d’emprisonnement et 15 000 € d’amende. Par ailleurs, la
tentative d’usurpation d’identité est répréhensible (Article
226-5 du Code pénal
). De plus, il est possible que l’auteur se voit appliquer des
peines dites complémentaires prévues par l’article
226-31 du Code pénal telle que l’interdiction des droits civiques, civils et de famille, l’interdiction d’exercer l’activité professionnelle ou sociale dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de laquelle l’infraction a été commise etc…
Remarque : Les peines sont portées à 2 ans d’emprisonnement et 30 000 € d’amende lorsque le délit est commis par le conjoint, concubin ou partenaire (Lié par un Pacs) de la victime. L’auteur de ce délit peut en effet être au plus proche de vous et la loi se montre alors plus sévère envers une personne à laquelle il est légitime de faire confiance.
III – Que faire en cas d’usurpation d’identité ?
S’agissant d’une
infraction instantanée, le délai de prescription court à compter de l’usurpation ou de l’usage. C’est-à-dire que vous disposez d’un
délai de 6 ans à compter de l’usage ou l’usurpation pour engager une action contre l’auteur de ce
délit. L’
usurpation d’identité est un délit pouvant causer de nombreux préjudices aux personnes qui en sont victimes. Les conséquences des actions de l’
usurpateur ne doivent en aucun cas être minimisées puisque celles-ci peuvent avoir de lourdes conséquences qui dans certains cas, suivent la victime tout au long de sa vie. Qu’il s’agisse d’une simple usurpation par laquelle vous vous retrouvez à payer une amende pour
infraction au Code de la route ou par laquelle vous êtes obligé de rembourser un crédit, il convient d’être réactif et prudent.
A ce titre, il convient de
déposer une plainte au plus vite auprès de la gendarmerie ou du commissariat de police le plus proche de votre domicile. Cette plainte entrainera le déclenchement d’une enquête qui, si vous ne connaissez pas l’auteur du délit, permettra d’identifier l’
usurpateur. Votre plainte sera transmise au procureur de la République qui décidera des suites à donner à votre dossier, il pourra alors être porté devant le
Tribunal correctionnel compétent.
Il est également possible de se
constituer partie civile afin d’obtenir une réparation du préjudice que vous avez subi par le versement de dommages et intérêts. Un
avocat en défense pénale peut vous conseiller sur les premières démarches à effectuer et au comportement à adopter pour éviter que la situation empire. De surcroit, il est important d’informer votre établissement bancaire pour qu’il puisse surveiller avec attention les mouvements opérés sur votre compte. Les actes de l’
usurpateur peuvent vous amener à être « fichée » à la banque de France, ce qui peut vous bloquer dans beaucoup d’opérations de la vie courante.
Tant que la justice n’aura pas statué en votre faveur, vous pourrez malheureusement toujours être mis en cause. Vous pouvez alors être contraints de payer des sommes qui n’ont pas été réellement souscrites par vous-même, ce qui peut avoir de lourdes conséquences financières mais également psychologiques. Certaines victimes ont beau faire de multiples démarches, si l’auteur n’est pas identifié et que votre statut de victime n’est pas établi, c’est malheureusement sur vous que pèseront les conséquences des actions de l’
usurpateur.
Il faut garder à l’esprit que les auteurs de tels délits ne ciblent pas simplement les personnalités publiques. Vous, votre voisin et toute autre personne de votre entourage êtes susceptibles d’être victime d’
usurpation d’identité. La place grandissante d’Internet et les réseaux sociaux peuvent y jouer un grand rôle et c’est pourquoi, il est conseillé de prendre ses précautions et ne pas communiquer n’importe où et à n’importe qui, ses informations personnelles.
Vous pensez être victime d’
usurpation d’identité et vous souhaitez être accompagnée tout au long de la procédure ?
Me ZENOU, avocat pénaliste à Paris mettra son expérience en la matière au service de vos intérêts. Le
Cabinet ZENOU surveillera attentivement sur toute la procédure et s’assurera que vos droits soient préservés.