Le délit de trafic d'influence

Le délit de trafic d'influence
Vous ne pouvez pas demander que l’on vous paie afin d’abuser de votre position. Vous tomberez sous le coup de la qualification du trafic d’influence. L’article vous expliquera concrètement de quoi il s’agit. Le trafic d’influence désigne le fait pour une personne, de recevoir, de solliciter, des dons dans le but d’abuser de son influence, réelle ou supposée, en raison de sa position ou de sa fonction, sur un tiers afin qu’il prenne une décision favorable.
 
Il s’agit d’un délit composé de trois personnes :
 
  • Le bénéficiaire, celui qui fournit des avantages ou des dons,
  • L’intermédiaire, celui qui utilise le crédit qu’il possède du fait de sa position,
  • La personne cible, la personne qui détient le pouvoir de décision, souvent une autorité administrative publique, un magistrat ou un expert.

Il est donc nécessaire de bien distinguer le trafic d’influence commis par des personnes exerçant une fonction publique avec celui commis par des personnes privées.
 
Le droit pénal différencie donc deux formes, le trafic d’influence actif, du côté du bénéficiaire, et le trafic d’influence passif, du côté de l’intermédiaire. Les dispositions liées au trafic d’influence sont régies par l’article 432-11 et suivants, ainsi que l’article 435-10 et suivants du Code pénal. L’article 432-11 du Code pénal vise le trafic d’influence passif, c’est-à-dire quand l’auteur du délit est un agent public. 
 
Le trafic d’influence a été incriminé par une loi du 4 juillet 1889, à la suite de nombreux scandales politiques, qui a mis en lumière les carences législatives en matière de rapports d’influence dans la sphère publique et politique. Des personnalités politiques, parmi lesquels se trouvait le député Wilson, gendre du président de la République, Jules Grévy, usaient ouvertement de leur influence pour faire attribuer des décorations, sans qu’il fût alors possible de les poursuivre pour escroquerie.
 
Il faut donc distinguer le trafic d’influence de l’escroquerie. L’article 313-1 du Code pénal dispose que « l'escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. »
 
Le trafic d’influence est beaucoup plus subtil, car on utilise une certaine influence afin d’obtenir des décisions favorables. L’escroquerie est plutôt un ensemble de manœuvres.
 
Le trafic d’influence comprend l’intervention de trois personnes, il faut donc distinguer de la corruption. La corruption est la perversion ou le détournement d'un processus, d'une interaction, avec une ou plusieurs personnes dans le dessein, pour le corrupteur, d'obtenir des avantages ou des prérogatives particulières ou, pour le corrompu, d'obtenir une rétribution en échange de sa complaisance. Le trafic d’influence se présente davantage comme un montage entre trois intervenants.
 
Il sera donc nécessaire d’aborder ce que représente le trafic d’influence (I), de voir la distinction entre l’élément matériel et l’élément moral de la qualification (II) afin de pouvoir se pencher sur les peines encourues (III).
 

I) Les modalités du trafic d’influence

                           
Le trafic d’influence est un délit, qui se matérialisé avec la participation de trois personnes.
 
La notion de trafic d'influence est proche de celle de la corruption. La différence réside alors dans le fait que le trafic d'influence nécessite la présence d'un intermédiaire entre le bénéficiaire potentiel et l'autorité public, qui va user de son influence pour obtenir la décision souhaitée.
 
On distingue alors deux types de trafic, le trafic d’influence actif et le trafic d’influence passif. Le trafic d’influence actif est incriminé par l’article 433-2 du Code pénal, qui lui cible plutôt le délit commis par un particulier ciblant un agent privé, alors que le trafic d’influence passif est encadré par l’article 432-11 du même code, qui lui est commis par des personnes exerçant une fonction publique.
 
Le trafic d'influence passif est le fait pour une personne de se laisser acheter, sur sa sollicitation ou à la demande d'un tiers, pour user de son influence afin de faire pencher certaines décisions. Le trafic d'influence actif quant à lui, consiste à rémunérer une telle personne pour qu'elle use ainsi de son influence. Pour vous permettre de mieux comprendre, il faut matérialiser cette différence en exemples.
 
Exemple : Le fait pour un expert de l’Agence nationale de sécurité du médicament, et des produits de santé (ANSM) d’accepter une somme d’argent d’un opérateur pour faire usage de son influence auprès d’un évaluateur, afin d’obtenir une décision favorable à cette entreprise, est constitutif d’un trafic d’influence passif.
 
Autre exemple : Une société qui verse des fonds à un agent pour qu’il use de son influence sur une commission d’appel d’offre dans l’optique d’attribuer un marché à cette entreprise, est constitutif d’un trafic d’influence actif.
 
Le trafic d’influence est par conséquent un délit incriminé, même lorsqu’il s’agit d’agents publics étrangers selon les termes de l’article 435-2 du Code pénal. L’auteur du délit de trafic d’influence passif doit donc avoir la qualité de dépositaire de l’autorité publique, être chargé d’une mission de service publique, investi d’un mandat électif en France ou bien à l’étranger.

Exemple : Tel est le cas pour un fonctionnaire de préfecture, un agent de la SNCF ou un adjoint auprès d’un maire.
 

II) L’élément matériel et l’élément moral

 
Deux éléments sont donc à prendre en compte, l’élément moral et l’élément matériel.
 
L’élément matériel est le procédé de l’événement. Dès lors qu’il y a une sollicitation ou un agrément qui porte sur des offres, des promesses, des dons, des cadeaux, pour l’auteur ou pour autrui. Peu importe si l’objet du trafic soit en nature ou en l’espèce.

Exemple : Il peut s’agir d’une voiture de luxe, d’une rémunération ou même d’arbres.
 
La sollicitation ou l’agrément peuvent provenir de l’auteur ou bien d’une tierce personne. Peu importe si la récompense réclamée ou agrée soit à destination d’une autre personne que l’’auteur. De même, peu importe que l’influence soit réelle ou supposée.

Exemple : Un greffier qui conseille le juge sur une décision à rendre.
 
L’auteur du trafic d’influence passif doit alors se présenter comme un intermédiaire, dont l’influence, réelle ou supposée, est de nature à faire obtenir une faveur quelconque ou une décision favorable d’une autorité publique ou d’une administration. La réalité de cette influence est donc indifférente, la jurisprudence prend en compte les faits et tentatives.
 
La notion de décision favorable est définie par la jurisprudence. En effet, toutes les difficultés liées à l’exécution d’un contrat, constitue une attribution de décision favorable, conférant un droit ou une faveur, au sens des articles 432-11 et 433-1 du Code pénal.
 
Concernant l’élément moral, on va prendre en compte l’intention de commettre un tel délit. En matière de trafic d’influence passif, l’auteur doit avoir conscience qu’il viole délibérément les règles qui encadrent sa profession. Par ailleurs, pour l’auteur du trafic d’influence actif, il doit avoir conscience qu’il a agit en dehors de ses droits ou a subtilisé des moyens qui ne lui étaient pas prédestinés. Se faire assister par un avocat en droit pénal s’avère donc nécessaire lorsqu’on est accusé de trafic d’influence.
 

III) Les peines encourues

 
Le trafic d’influence est par conséquent pénalement répréhensible, plusieurs peines sont applicables aux faits en l’espèce.
 
Pour cause, le trafic d’influence passif régi par l’article 432-11 du Code pénal dispose qu’est puni de 10 ans d’emprisonnement et d’une amende de 1.000.000 €, le fait pour une personne dépositaire de l’autorité publique ou investie d’un mandat électif de solliciter ou d’agréer, sans droit, à des offres, des promesses, des dons, des présents ou avantages quelconques. D’ailleurs, ce montant peut être porté au double du produit tiré de l’infraction.
 
Le trafic d’influence passif va donc prendre en compte deux choses de son auteur :
 
  • Accomplir ou s’abstenir d’accomplir un acte de sa fonction, de sa mission ou de son mandat.
  • Abuser de son influence réelle ou supposée en vue de faire obtenir d’une autorité ou d’une administration publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable.
 
La peine d’amende sera alors portée à 2.000.000 €, ou bien dans le cas où le montant est excédé au double du produit de l’infraction, dès lors que les infractions portent atteinte aux recettes perçues, aux dépenses exposées ou aux avoirs qui relèvent du budget de l’Union européenne, des budgets des institutions, organismes de l’Union européenne ou des budgets contrôlés directement par eux et qu’elles sont commises en bande organisée.
 
Concernant le trafic d’influence actif, c’est l’article 433-1 dudit code, quand l’auteur est un agent public, qui puni également de 10 ans d’emprisonnement et d’une amende de 1.000.000 €, le fait, par quiconque, de proposer sans droit, à tout moment, des offres, des promesses, des dons ou des avantages quelconques à une personne dépositaire de l’autorité publique, pour elle-même ou pour autrui.
 
Le trafic d’influence actif prendra alors en compte le fait d’abuser, d’une influence en vue de faire obtenir d’une autorité publique des distinctions, des emplois, des marchés ou toute autre décision favorable. Même chose, la peine d’amende est portée à 2.000.000 € ou au double du produit de l’infraction, si ce montant est excédé, lorsque les infractions portent atteinte aux avoirs qui relèvent du budget des institutions de l’Union européenne.
 
De plus, est puni de 5 ans d'emprisonnement et d'une amende de 500 000 €, dont le montant peut être porté au double du produit tiré de l'infraction, tout trafic d’influence envers une personne dépositaire, de l'autorité publique dans un Etat étranger ou au sein d'une organisation internationale publique.
 
Avez-vous besoin d’un avocat pénaliste ? Maître Johan ZENOU, avocat en droit pénal à Paris, vous défendra si vous êtes assigné judiciairement pour un délit de trafic d’influence. Son conseil et son expertise vous sera bénéfique dans l’espoir de faire tomber une telle qualification.

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