La
santé au travail est un sujet très important. Les méthodes de travail, l’ambiance, les projets mis en place par l’
employeur et plus encore sont des éléments pouvant impacter directement la santé des
salariés. Ainsi, les représentants du personnel vont être chargés de prévenir les risques pour la
santé et sécurité au travail et vont pouvoir dans certains cas recourir à des
expertises permettant d’étudier plus concrètement la réalité des risques pour la santé et sécurité afin d'y mettre un terme.
C’est le
Comité social et économique (CSE), instance représentative du personnel, qui a une compétence générale en matière de
santé, de
sécurité, et de conditions de travail. Le comité social et économique va ainsi pouvoir analyser les risques professionnels auxquels peuvent être exposés les travailleurs à leurs effets et va pouvoir également susciter des initiatives qu’il estime utile en matière de harcèlement moral
et
sexuel (Article
L.2312-9 du Code du travail).
Cette compétence peut être déléguée à la
Commission, santé, sécurité et conditions de travail (
CSSCT). En effet, celle-ci se voit confier, par délégation du
CSE, tout ou partie des attributions du comité relatives à la
santé, à la sécurité et aux conditions de travail (Article
L. 2315-38 du Code du travail). La
CSSCT va ainsi pouvoir être saisie sur tout sujets relatifs à la santé et sécurité au travail, comme le
harcèlement moral et sexuel ou encore des pratiques discriminatoires. À ce titre, il dispose d’un pouvoir d’enquête, mais également du pouvoir de proposer des expertises. Votre
avocat en
droit syndical vous délivre une explication sur les cas de recours à une
expertise et son utilité au sein de l’entreprise.
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Qui peut décider du recours à l’expertise ?
La
CSSCT a, par délégation du CSE, compétence sur les questions relatives à la santé et sécurité au travail. Toutefois, il est prévu expressément par le Code du travail que le recours à l’expertise demeure la compétence du CSE.
Cela signifie que la décision de recourir à un expert revient en pratique au
CSE. Par conséquent, la CSSCT est seulement habilitée à
proposer un tel recours. Ainsi, il appartient au CSE de voter lors d’une réunion le recours à un expert qui fera l’objet d’une délibération. La CSSCT va pouvoir servir de relai direct entre l’expert et le CSE. Le CSE va donc faire appel à un
expert habilité. Cette habilitation consiste en une certification attestant des compétences de l’expert en la matière délivrée par un organisme certificateur accrédité
(Article
R. 2315-51 du Code du travail).
L'organisme certificateur va tenir un répertoire des organismes experts habilités et le rend accessible au public, au moyen d'un site internet. Ce répertoire fait apparaître la liste des organismes experts dont la certification est suspendue ou retirée. Cette certification est un gage de qualité, car elle est délivrée en tenant compte des compétences de l’expert notamment en termes de diplômes et d’expérience professionnelle.
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Dans quels cas recourir à une expertise ?
L’expertise peut être utilisée en cas de
risque grave, identifié et actuel, révélé ou non par un
accident du travail, une
maladie professionnelle ou à caractère professionnel est constaté dans l'établissement (Article
L.2315-94 du Code du travail). Cette
expertise est très importante puisque l’expert habilité va permettre de comprendre les facteurs de risque présents dans l’
entreprise. Il va pouvoir identifier les causes, les conséquences et proposer des pistes d’améliorations et axes de réflexion afin de limiter ou d’éviter le risque en question. La notion de risque grave a été interprétée par la jurisprudence comme un risque identifié et actuel, formule reprise dans le Code du travail.
Voici quelques exemples de situation dans lesquelles le risque grave justifiait le recours à une expertise :
- En cas d’accident mortel inexpliqué d’un salarié. Au vu de la gravité de la situation et des circonstances mystérieuses de cet accident ayant coûté la vie à un salarié, une expertise a pu être mise en place pour étudier les conditions de l’accident et informer sur le risque de renouvellement et moyens de prévenir un tel accident (Cass. Soc. 21 juin 2016, n°15-12809).
- En cas de harcèlement moral pratiqué par un directeur général à l'encontre des salariés. Cette situation entrainait des absences de plusieurs salariés, car le directeur avait un comportement méprisant, imposaient des mutations et humiliait même un cadre de son entreprise. (Cour d'appel Paris 31-3-2006 n° 05-19203).
Intéressant : La Cour de cassation tend à reconnaitre également l’existence d’un risque grave en présence d’un risque pour la santé mentale et psychologique des
salariés.
Elle avait pu conclure en l’existence d’un risque grave justifiant une
expertise pour une situation de surcharge de travail qui mettait les salariés dans une situation d’épuisement professionnel (
Cass. Soc, 25 septembre 2019, 18-14.110).
Il faut savoir que l’
employeur peut contester l’
expertise. Il appartient ainsi au
CSE, qui se prévaut d'un risque grave justifiant le recours à un expert, de rassembler des éléments de preuve permettant d’établir l'existence d'un tel risque. N’hésitez pas à prendre conseil auprès d’un
avocat en
défense syndicale à ce sujet. L’expertise peut également être utilisé en cas d'introduction de nouvelles technologies ou de projet important modifiant les conditions de
santé et de
sécurité ou les conditions de travail (Article
L.2315-94 du Code du travail). C’est l’idée que des changements au niveau de votre matériel, des logiciels utilisés et… peuvent entrainer des modifications sur vos conditions de santé et de sécurité et qu’il convient d’étudier ces modifications et leurs risques.
Exemple : En cas de regroupement dans le même espace de vente des produits GSM et MP3 qui relevaient jusqu’alors de rayons différents. Les salariés devaient assurer la vente de tous les produits : baladeurs MP3, assistants personnels et téléphones mobiles (Cour d'appel Paris 26-4-2006 n° 05-19702, 14e ch. A, Sté Fnac Paris c/ CHSCT de l'Ets Fnac Saint-Lazare).
Bon à savoir : Il est possible de recourir à une
expertise même si le projet d’introduction de nouvelles technologies est déjà mis en œuvre. L’utilisation de nouvelles technologies de surcroit accompagnées de l’utilisation de tablettes, application spécifique, formation spéciale et qualifié de projet d’
entreprise emportait des modifications assez importantes sur les conditions de travail et justifiait qu’on le qualifie de projet important (
Cass. Soc. 14 mars 2018, n°16-27683).
Dans certaines circonstances, la résistance de votre
employeur et l’obstruction aux missions de l’expert peut constituer un
délit d’entrave.
Si vous rencontrez des difficultés et de la résistance de la part de votre employeur, un
avocat en
défense entreprise peut vous apporter le soutien nécessaire. Inversement, si l’introduction de ces nouvelles technologies ou le projet important n’a qu’un impact mineur, alors le recours à l’expertise n’est pas justifié.
Exemple : En cas de déplacement de bureaux d'un étage à un autre au sein du même bâtiment standardisé avec des équipements collectifs identiques (Cour d'appel Bordeaux 5-5-2010 n° 09-2309, 5e ch. civ., CHSCT Pages jaunes sud-ouest c/ Sté Pages jaunes sud-ouest).
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Qui prend en charge les frais de cette expertise ?
Recourir à une
expertise a un coût. Étant donné que cette expertise est faite dans l’intérêt des
salariés, il est logique que l’
employeur, tenu d’une obligation de sécurité et de santé envers ses salariés, prenne en charge le recours à une telle expertise. Ainsi, les
frais d’expertise sont pris en charge intégralement par l’employeur s’agissant de l’expertise ordonnée en cas de risque grave (Article
L.2315-80 du Code du travail). S’agissant de l’expertise en cas d’introduction de nouvelles technologies ou de projet important, les frais sont partagés entre le CSE et l’employeur. Il est prévu que 20% des frais sont prélevés sur le budget de fonctionnement du
CSE et l’employeur finance les 80% restants.
Bon à savoir : Le coût de cette expertise peut être supportée intégralement par l’employeur si le budget de fonctionnement du CSE est insuffisant et n’a pas donné lieu à un transfert d'excédent annuel au budget destiné aux activités sociales et culturelles au cours des trois années précédentes.
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L’employeur peut-il s’opposer à l’expertise ?
L’employeur peut tout à fait contester l’
expertise, et ce, pour plusieurs motifs (Article
L.2315-86 du Code du travail). L’
employeur va saisir le juge judiciaire de :
- La délibération du CSE décidant le recours à l'expertise s'il entend contester la nécessité de celle-ci ;
- La désignation de l'expert par le CSE s'il entend contester le choix de cet expert.
- La notification à l'employeur du cahier des charges établi par le CSE et des informations communiquées par l'expert s'il entend contester le coût prévisionnel, l'étendue ou la durée de l'expertise.
- La notification à l'employeur du coût final de l'expertise s'il entend contester ce coût.
Ces différentes contestations peuvent par exemple mettre à la charge du
CSE une partie du coût de l’expertise ou remettre en cause la justification de l
’expertise.
Votre
employeur conteste le recours à l’
expertise ou sa prise en charge ? Me ZENOU,
avocat en défense collective à Paris vous aiguille sur la marche à suivre pour faire reconnaitre l’utilité de votre expertise. Le
Cabinet ZENOU, situé dans le
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Paris, met son expérience au service de vos élus et
syndicats afin que vous puissiez exercer vos missions sans entrave.