I. Quelle est l’utilité d’une clause de non-concurrence ?
La clause de non-concurrence comme son nom l’indique vient poser l’interdit au salarié d’exercer une activité concurrentielle à celle de son précédent employeur et vient ainsi limiter la liberté de travail de votre salarié. Il est évident que pendant la durée du contrat de travail, votre salarié ne doit pas exercer une activité concurrente de la votre en raison de l’obligation de loyauté à laquelle il est tenu. Par ailleurs, c’est ici ce qui fait la distinction avec l’obligation de loyauté : la clause de non-concurrence a vocation à jouer après la rupture du contrat de travail tandis que l’obligation de loyauté a vocation à jouer pendant le contrat.
Cette clause peut s’avérer extrêmement utile si votre entreprise est implantée à un endroit où le marché est rude et/ou évolue dans un secteur compétitif. En opposant une clause de non-concurrence à votre salarié, vous vous assurer qu’une fois qu’il aura décider de ne plus travailler avec vous, celui-ci ira au moins s’installer dans un autre secteur que celui dans lequel vous évoluez. De cette manière, vous aurez une garantie minimale à ce que votre clientèle ne vous quitte pas ou plutôt ne soit pas détournée.
Rappel : Le détournement de clientèle s’apparente à une violation contractuelle de l’obligation de loyauté prévue par les articles 1103 et 1104 du Code civil, et de l’obligation de fidélité du salarié envers son employeur, prévue par l’article L.1222-1 du Code du travail. Il est possible d’intenter une action en justice envers son salarié pour un tel comportement.
A quelles conditions puis-je valablement opposer une telle clause à mon salarié ?
Comme toute autre clause du contrat de travail imposant au salarié une obligation particulière, celle-ci doit recueillir l’accord clair, exprès et non équivoque du salarié pour lui être opposable (Cass. Soc. 1-4-2020 n° 18-24.472 FS-D). En pratique, la signature du salarié apposé sur le contrat de travail avec la mention « lu et approuvé » ou « bon pour accord » permet de matérialiser cet accord. De la même manière, la clause stipulée par avenant au contrat de travail sera opposable au salarié dès lors qu’il aura donné son accord exprès.
Important : Si jamais le salarié venait à contester l’existence de cette clause de non-concurrence et notamment son accord à celle-ci, il vous appartient en tant qu’employeur de prouver l’accord du salarié.
II. Quelles sont les conditions de validité d’une clause de non-concurrence ?
La clause de non-concurrence doit répondre à plusieurs conditions de validité afin d’être pleinement opposable et applicable au salarié :
En premier lieu, la clause doit être indispensable à la protection des intérêts légitimes de l’entreprise. Par cette formule, il est entendu qu’il n’est pas légitime pour certaines entreprises, certains secteurs d’activités d’imposer une telle clause. Ainsi, il a pu être jugé à propos d’une clause imposée à un laveur de carreaux qu’elle était nulle pour non-respect de cette condition (Cass. Soc. 14-5-1992 n° 89-45.300). Le niveau de qualification et de responsabilité d’un tel salarié ne justifiait pas en effet une telle clause.
En second lieu, la clause doit être limitée dans le temps et l’espace. La clause de non-concurrence ne peut pas prévoir une interdiction perpétuelle ni trop longue et sur un secteur géographique trop vaste.
Exemple : Il n’est pas possible d’interdire à un salarié technicien dans le secteur de la radiologie d’exercer son activité sur l’ensemble du territoire français métropolitain pendant 2 ans. Une telle clause a pu être jugée illicite (Cass. Soc. 28-10-1997 n° 94-43.792).
En troisième lieu, la clause doit tenir compte des spécificités de l’emploi du salarié. Cette condition appelle à une appréciation concrète de la situation. De cette manière, une clause peut être valable s’il s’agit d’un secteur hautement concurrentiel et inversement peut être considérée comme illicite.
Vous devez retenir que d’un salarié à l’autre, une interdiction d’une durée d’un an peut être jugée excessive comme tout à fait licite. Pour vous assurer de la validité de la durée que vous souhaitez imposer au salarié, prenez conseil auprès d’un avocat spécialisé dans la défense de l’employeur. Enfin, la clause de concurrence n’est licite que si elle comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière. A noter que ces conditions de validité sont cumulatives (Cass. Soc. 26-1-2005 n° 02-45.193 F-D).
Focus sur la contrepartie financière :
S’agissant de la contrepartie financière, à l’inverse de la clause de confidentialité, la contrepartie financière est un élément de validité de la clause de non-concurrence. C’est notamment depuis des arrêts de 2002 que la Cour de cassation a consacré cette condition de validité (Notamment Cass. Soc. 10-7-2002 n° 00-45.135 FP-PBRI). La loi ne prévoit pas de montant minimum et c’est ainsi la jurisprudence qui en a fixé les limites. Il a pu être jugé qu’une contrepartie financière dérisoire équivalait à une absence de contrepartie et rendait la clause nulle (Cass. Soc. 15 novembre 2006, n° 04-46721).
Soyez vigilants, la convention collective applicable à votre entreprise peut prévoir un minimum qu’il convient alors de respecter. En pratique, le montant de cette indemnité est déterminé en fonction d'un pourcentage de la rémunération mensuelle brute du salarié.
Exemple : La convention collective des experts-comptables prévoit une indemnité d’au moins 25 % de la rémunération mensuelle perçue en moyenne au cours des 24 derniers mois, quel que soit le cas de rupture du contrat.
S’agissant du paiement de la contrepartie financière, celle-ci est due quel que soit le motif de rupture du contrat de travail. Ainsi, il a été jugé qu’elle ne peut jamais être minorée en fonction du mode de rupture (Cass. Soc. 18-1-2018 n° 15-24.002 FS-PB). Que ce soit une démission, licenciement pour faute grave, rupture conventionnelle etc…le montant de l’indemnité doit être la même. Dans le cas contraire, le salarié pourra prétendre à l’indemnité la plus élevée.
Il est également impossible de prévoir que le montant de l’indemnité dépende uniquement de la durée d’exécution du contrat. Il est conseillé de prévoir une indemnité proportionnelle au salaire du salarié et à la durée de l’interdiction de concurrence. De manière logique, l’indemnité doit être versée au salarié au moment de son départ de l’entreprise. Ainsi, elle pourra figurer sur les documents de fin de contrats remis au salarié. Il convient de la verser en une seule fois ou alors sous forme de mensualités pendant la durée de l’interdiction.
En cette période de Covid-19, certaines entreprises se retrouvent en situation de liquidation judiciaire, auquel cas, le versement de l’indemnité sera toujours requis. Il reviendra donc à l'association pour la garantie des salaires (AGS) de procéder au versement de l’indemnité.
Attention : Le versement ne peut intervenir qu’au moment de la rupture et pas avant. Il n’est pas possible ainsi de verser des sommes au cours du contrat de travail en prétendant qu’il s’agit de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence. Si vous faites cela, vous ne pourrez pas en obtenir le remboursement même si vous renoncer à la clause car ils seront considérés comme des compléments de salaire (Cass. Soc. 15-1-2014 n° 12-19.472 FS-PB).
La jurisprudence est relativement sévère avec les employeurs s’agissant d’une clause de non-concurrence, ainsi n’hésitez pas à vous rapprocher de Maître Zenou avocat en droit employeur qui saura vous accompagner dans vos démarches.
Est-il possible de renoncer au bénéfice de la clause ?
Oui, et vous devez savoir que dans ce cas-là, cette possibilité de renonciation doit être prévue par le contrat de travail ou la convention collective. A défaut, il faudra obtenir l’accord du salarié. Il faudra également respecter les formes et délais de renonciation tels que prévus par le contrat de travail ou la convention collective. Dans ce cas-là, vous êtes libéré de l’obligation de verser l’indemnité de non-concurrence à votre salarié, de quoi limiter les sommes à lui verser au moment de la rupture du contrat de travail.
Bon à savoir : Il est possible de libérer le salarié de cette clause au plus tard au moment du licenciement. Une renonciation évoquée dans la lettre de licenciement a pu être jugée valable (Cass. Soc. 24-4-2013 n° 11-26.007 FS-PB).
A défaut de respect de l’une des conditions exposées ci-dessus, la clause sera considérée comme illicite et frappée de nullité. Le salarié visé par la clause pourra donc choisir de travailler pour votre concurrent, sans délai et au sein de la zone géographique qui était visée par la clause.
Si jamais la clause est reconnue comme nulle et que le salarié l’a tout de même respecté, vous pouvez être condamné à payer des dommages et intérêts pour le préjudice qu’il a subi même si vous avez déjà versé l’indemnité de non-concurrence. L’idée est que le salarié a nécessairement subi un préjudice du fait du respect de cette clause. Il a injustement été limité dans sa liberté du travail et doit donc bénéficier d’une réparation.
Evidemment, si le salarié ne respecte pas une clause de non-concurrence qui est valable, il cessera de toucher son indemnité de non-concurrence et pourra également être condamné à des dommages et intérêts pour le préjudice que vous avez subi. Il vous appartiendra toutefois de prouver cette violation en démontrant que votre salarié a accompli de véritables actes concrets de concurrence.
Intéressant : le seul fait de postuler un emploi auprès d’un concurrent ne suffit pas à démontrer la violation de la clause de non-concurrence (Cass. Soc. 12-5-2004 n° 02-40.490 F-P).
Vous souhaitez être assisté dans la rédaction d’une clause de non-concurrence ? Me ZENOU, avocat en droit du travail à Paris 20ème vous propose son aide et ses précieux conseils. Le Cabinet d’avocats ZENOU, met ses connaissances en défense entreprise au service de vos intérêts et vous indique la marche à suivre en cas de violation de la clause par l’un de vos salariés.
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