Licenciement économique : Définition, Mise en œuvre et Réglementation

Licenciement économique : Définition, Mise en œuvre et Réglementation
La crise sanitaire liée à la Covid-19 a été le synonyme d’interruption d’activité pour beaucoup d’entreprises, interruption plus ou moins longue selon le secteur d’activité. Les entreprises ont alors eu recours en masse au chômage partiel afin de limiter les effets de la crise sur leur activité. D’autres ont dû avoir recours à des licenciements pour motif économique afin de permettre la survie partielle de leur entreprise. Bien que la crise sanitaire ne soit pas encore terminée, celle-ci pose ainsi la question du licenciement économique. Votre avocat en droit du travail à Paris vous propose un tour d’horizon sur la notion.
 

I. Qu’est-ce qu’un licenciement pour motif économique ?


En parallèle du licenciement pour motif personnel (licenciement disciplinaire, licenciement pour inaptitude etc…), il est question du licenciement pour motif économique. Comme son nom l’indique, ce licenciement tient donc non pas à la personne du salarié mais à un motif économique extérieur au salarié. L’article L.1233-3 du Code du travail énonce en outre qu’il s’agit du licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives à des difficultés économiques caractérisées, à des mutations technologiques, à une réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, à la cessation d'activité de l'entreprise.


II. Comment le licenciement pour motif économique est-il mis en œuvre ?


Afin qu’un licenciement économique soit justifié, il est nécessaire de satisfaire à 3 conditions :
 
  1. Une certaine incidence sur l’emploi
Il est nécessaire de relever (de manière alternative) :
  • La suppression d’un emploi.
  • La transformation de l’emploi.
  • Une modification du contrat de travail refusée par un salarié.
 
Rappel : Une modification du contrat de travail s’entend d’une modification d’un élément substantiel du contrat de travail tel que la modification de la durée de travail, de la qualification ou encore de la rémunération.
 
  1. Une cause économique réelle et sérieuse
Le Code du travail fixe limitativement les causes d’un licenciement économique. Il s’agit donc des seules causes pouvant justifier un licenciement pour motif économique. S’agissant des mutations technologiques, c’est l’idée que l’entreprise s’adapte au progrès technologique et choisit ainsi de procéder à des changements particuliers pour adapter ses méthodes de travail. Exemple : L’informatisation d’un service qui était jusque-là réalisé manuellement par des salariés.

S’agissant de la réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, c’est l’idée pour l’employeur d’être contraint de restructurer son entreprise à défaut de quoi, cette dernière subirait des conséquences économiques néfastes. Sans cette réorganisation, l’entreprise perdrait en efficacité et perdrait sa place sur le marché. S’agissant de la cessation d’activité de l’entreprise, il est assez simple de comprendre de quoi il s’agit. Si votre entreprise cesse son activité, les salariés qui participaient à cette activité n’ont plus de travail à fournir, ce qui justifie leur licenciement.

S’agissant enfin des difficultés économiques caractérisées, le Code du travail donne des indications très particulières sur l’appréciation de ces dernières. Il y a difficulté économique lorsque l'entreprise connaît une évolution significative d'au moins un indicateur économique tel que :
 
  • Une baisse des commandes ou du chiffre d'affaires.
  • Des pertes d'exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l'excédent brut d'exploitation.
  • De tout autre élément de nature à justifier de difficultés économiques.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d'affaires est constituée lorsqu’en comparaison avec la même période de l'année précédente, la baisse atteint une durée qui varie en fonction de la taille de l'entreprise, dans les conditions suivantes :
 
 Effectif de l’entreprise Nombre de trimestres de baisse des commandes ou du chiffre d’affaires constituant une baisse significative
Moins de 11 salariés 1 trimestre suffira
Au moins 11 salariés et moins de 50 salariés 2 trimestres consécutifs
Au moins 50 salariés et moins de 300 salariés 3 trimestres consécutifs
Au moins 300 salariés 4 trimestres consécutifs
 
  • A quel niveau le motif économique est-il apprécié ?
 
Auparavant, le motif économique devait être apprécié au niveau de l’entreprise et si l’entreprise appartenait à un groupe, celui-ci devait être apprécié au niveau du secteur d’activité du groupe. Dès lors, une entreprise ayant des difficultés ne pouvait invoquer légitimement des difficultés économiques, à son niveau pour opérer un licenciement économique alors que les finances du groupe se portaient bien. Désormais, le Code du travail précise que le motif économique est apprécié, par rapport aux entreprises du groupe se trouvant sur le territoire national lorsque l’entreprise appartient à un groupe. Auparavant, cette limite territoriale n’existait pas et créait une certaine rigidité pour les entreprises.

Il était ainsi plus difficile de se faire licencier pour motif économique si l’entreprise, dans laquelle le salarié travaillait appartenait à un groupe en bonne santé financière. Encore faut-il que l’entreprise appartienne réellement à un groupe au sens du Code du travail, soit un groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu'elle contrôle. Depuis la loi Travail du 8 août 2016, le licenciement économique a donc connu quelques changements tant au niveau du fond que de la procédure.
 
  • Comment les difficultés économiques vont-elles être appréciées en temps de Covid-19 ?
Le Code du travail prévoit ainsi d’opérer une comparaison entre une période T et la même période de l’année précédente. La question peut alors se poser de la pertinence d’une telle comparaison lorsqu’on sait que de nombreuses entreprises, n’avaient aucune activité économique du fait des restrictions sanitaires. Les répercussions de la crise sanitaire peuvent être de nature à justifier des licenciements économiques pour difficultés économiques mais cette appréciation pourrait invalider le fond du licenciement.

La comparaison serait réalisée entre une période où l’entreprise a repris une activité et une période où elle n’en avait aucune. Les difficultés économiques seraient de facto non caractérisées. Sur cette question, il est encore trop tôt pour se prononcer mais la crise sanitaire, a indéniablement laissé beaucoup d’entreprises dans un état financier fragile. Il ne reste plus qu’à attendre les premières décisions des juridictions concernant des contestations de licenciement économique afin de savoir ce qu’il en est réellement.

Toujours est-il que cette zone d’ombre crée une certaine insécurité juridique tant pour les entreprises qui subissent de plein fouet la crise, et se posent la question du licenciement économique, que pour les salariés qui sont susceptibles de faire l’objet de tels licenciements. Cependant, l’article L.1233-3 du Code du travail laisse une certaine marge de manœuvre au juge qui pourra apprécier les difficultés économiques, en se basant sur tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés. Il y a lieu de penser que les conséquences économiques de la crise sanitaire, puissent ainsi justifier des difficultés économiques à cet égard et permettre aux employeurs de procéder valablement à des licenciements économiques.
 
  1. L’obligation de reclassement
Avant de procéder au licenciement économique, l’employeur doit satisfaire à une obligation de reclassement. C’est l’article L.1233-4 du Code du travail qui prévoit les modalités de cette obligation. Il doit ainsi chercher à reclasser le salarié dans un emploi de même catégorie ou équivalent assorti d’une rémunération équivalente. Il est également possible, mais seulement avec l’accord du salarié, de le reclasser sur un emploi de catégorie inférieure.

Cette obligation de reclassement implique de la part de l’employeur de rechercher tous les postes disponibles et susceptibles de convenir au licenciement économique pour un salarié. Cette recherche se fait donc après avoir établi un ordre des licenciements, selon des critères bien établis par le Code du travail. Cet ordre prendra ainsi en compte la situation personnelle des salariés, afin d’établir à qui un licenciement causera le moins de préjudice.

Si l’entreprise n’appartient pas à un groupe, cette recherche s’effectue au niveau de l’entreprise. Inversement, l’employeur devra effectuer une recherche auprès de toutes les entreprises du groupe présentes sur le territoire national.

Bon à savoir : L’employeur n’est pas tenu de rechercher des postes de reclassement à l’étranger. A vous de vous manifester auprès de votre employeur si vos projets professionnels peuvent se réaliser à l’étranger.

Une fois cette recherche effectuée, l’employeur devra proposer un ou plusieurs postes au salarié. En tout état de cause, ces propositions doivent être écrites et précises. Auparavant, les propositions devaient être personnalisées, c’est-à-dire adaptées à la situation du salarié. Désormais, le Code du travail prévoit une option pour l’employeur :
 
  • Soit il adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié.  
  • Soit il diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés.
 
C’est seulement si aucun poste de reclassement n’est disponible, ou que le salarié a refusé les postes qui étaient disponibles et qu’aucun autre poste n’est disponible que l’employeur est réputé avoir satisfait à son obligation de reclassement.

Intéressant : Si l’employeur vous licencie pour motif économique et prétend avoir satisfait à son obligation de reclassement, alors que des postes disponibles et adaptés ne vous ont pas été proposés, il est possible de contester son licenciement économique devant le Conseil de prud’hommes.

A défaut de respect de cette obligation de reclassement, le licenciement sera requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse et ouvrira droit au salarié de percevoir l’indemnité correspondante (Cass. Soc. 19-11-2008 n° 07-44.416). Une fois que ces 3 conditions sont remplies, s’agissant d’un licenciement individuel, l’employeur devra suivre la procédure classique avec quelques particularités à respecter. Le salarié concerné sera donc convoqué à un entretien préalable au licenciement, au cours duquel l’employeur pourra exposer les raisons de ce licenciement (le motif économique essentiellement).

Une fois cet entretien passé, l’employeur ne pourra notifier le licenciement qu’une fois qu’un délai de 7 jours ouvrable se soit écoulé. Ce délai passe à 15 jours ouvrable minimum pour les cadres (L'article L.1233-15 du Code du travail). Cette lettre devra par ailleurs contenir la possibilité de demander le bénéfice d’une priorité de réembauchage, permettant au salarié licencié de se voir proposer en priorité un poste disponible au sein de l’entreprise, et compatible avec sa qualification. Vous vous interrogez sur vos droits en matière de licenciement économique ? Le Cabinet ZENOU, avocat en droit social à Paris 20ème vous assiste dans la sauvegarde de vos intérêts.

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