La prise d’acte de la rupture du contrat de travail : définition, procédure et conséquences

La prise d’acte de la rupture du contrat de travail : définition, procédure et conséquences
Votre employeur a manqué à ses obligations contractuelles et vous souhaitez rompre votre contrat de travail à ses torts ? Le Cabinet d’avocat ZENOU en droit du travail à Paris 20ème vous explique les risques que la prise d’acte comporte et les différentes conséquences qu’elle peut entraîner.
 
  • Qu’est-ce que la prise d’acte du contrat de travail ?
La prise d’acte de la rupture du contrat est un mode de rupture du contrat de travail à l’initiative du salarié, lorsque celui-ci reproche des faits à son employeur. Cette rupture peut soit produire les effets soit d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifient, soit, dans le cas contraire, produire les effets d’une démission (Soc., 25 juin 2003, n° 01-42.679). Ce mode de rupture du contrat de travail n’est ainsi pas sans risque pour le salarié, car si les faits qu’il invoque ne justifient pas une prise d’acte, il risque d’être privé d’indemnités de chômage puisque le régime de la démission s’applique alors.

Par conséquent, l’enjeu pour le salarié est de faire qualifier la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail, comme un licenciement sans cause réelle et sérieuse qui lui permettra alors de bénéficier des indemnités prévues à l’article L.1235-3 du Code du travail. En outre, la mise en place de la prise d’acte se fait par procédure judiciaire, à l’issue de laquelle le juge déterminera si la prise d’acte produit les effets d’une démission ou d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cette procédure est fixée à l’article L.1451-1 du Code du travail. 

Il s’agira dans cet article de vous indiquer la procédure à suivre pour prendre acte de la rupture du contrat de travail (I), puis d’expliquer dans quels cas elle produit les effets d’un licenciement aux torts de l’employeur (II) ou d’une démission (III), et enfin comprendre ce qu’il se passe lorsque la prise d’acte concourt avec d’autres modes de rupture du contrat de travail (IV).
 

I – Quelle est la procédure à suivre pour prendre acte de la rupture du contrat de travail ?  

 
  • Quels formalités le salarié doit-il suivre pour prendre acte de la rupture de son contrat de travail ?
La prise d’acte ne requiert aucun formalisme particulier, elle peut être orale ou même communiquée par l’avocat du salarié (Soc., 4 avril 2007, n° 05-42.847), le salarié doit simplement manifester sa volonté de rompre le contrat. Il est cependant préférable de prendre acte par écrit pour qu’elle puisse être un élément de preuve pour les griefs du salarié contre l’employeur. Le salarié en contrat à durée indéterminée (CDI) n’est pas non plus tenu de respecter une quelconque période de préavis, pour rupture de son contrat de travail (Soc. 26 mai 2010, n°08-70.253). De plus, la prise d’acte étant définitive, la relation de travail cesse immédiatement et le salarié ne peut plus rétracter sa décision (Soc., 14 octobre 2009, n° 08-42.878).
 
  • La saisine du juge par le salarié
Le salarié ayant pris acte de la rupture de son contrat de travail doit ensuite saisir le juge prud’hommal. Depuis 2014, la demande est directement portée devant le bureau de jugement qui statue dans le délai d’un mois (L'article L.1451-1 Code du travail). Dans le cas où la prise d’acte a été formalisée dans une lettre, cette dernière ne fixe pas les limites du litige. Le salarié peut invoquer des faits antérieurs à la prise d’acte lors de l’audience (Soc., 29 juin 2005, n° 03-42.804). Le juge décidera par la suite si les faits invoqués à l’appui de la prise d’acte la justifient ou non. Maître ZENOU, expert en défense des salariés est présent pour vous accompagner dans la saisine du Conseil de prud’hommes et vous représenter en audience.
 

II – Dans quels cas la prise d’acte produit-elle les effets d’un licenciement aux torts de l’employeur ?
 

  • Quels faits justifient la prise d’acte du contrat de travail ?  

Deux conditions doivent être remplies pour que la prise d’acte produise les effets d’un licenciement aux torts de l’employeur. Les faits reprochés à l’employeur doivent être suffisamment grave (1ère condition) pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail (2nd condition) (Soc., 26 mars 2014, n° 12-23.634). La prise d’acte produit en principe les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, mais elle peut également produire les effets d’un licenciement nul dans le cas d’harcèlement ou de discrimination.

Exemple : Vous avez été harcelé par des collègues sur votre lieu de travail, et votre employeur n’a pas réagi à la situation que vous lui avez rapportée. Etant tenu d’une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé, et de la sécurité des salariés en vertu des articles L. 4121-1 et suivants du Code du travail, votre employeur a manqué à ses obligations contractuelles, rendant ainsi impossible la poursuite de votre contrat de travail. La prise d’acte de votre contrat de travail produira les effets d’un licenciement nul.
 

  • Quels sont les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ?

Le licenciement sans cause réelle et sérieuse produit des obligations qui pèsent sur l’employeur. Il doit verser une indemnité de licenciement au salarié et lui remettre des documents.
L’employeur est tenu de verser au salarié une indemnité calculée en fonction de l’ancienneté du salarié. Le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés à l’article L. 1235-3 du Code du travail (L'article L.1235-3-2 Code du travail). L’employeur doit également remettre au salarié un certificat de travail (L'article L.1234-19 Code du travail), un solde de tout compte faisant l’inventaire des sommes versées au salarié lors de la rupture du contrat de travail, et une attestation Pôle emploi (documents de fin de contrat), permettant au salarié d’exercer ses droits aux prestations de chômage (L'article R.1234-9 Code du travail).  

En outre, l’employeur est redevable de dommages et intérêts pour compenser le préjudice subi par le salarié, et du remboursement à Pôle Emploi des allocations de chômage, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage (L'article L.1235-4 Code du travail).
 

  • Quels sont les effets d’un licenciement nul ?

La rupture du contrat du travail est prononcée par les juges aux torts de l’employeur produit les effets d’un licenciement nul lorsque l’employeur viole une liberté fondamentale, commet des faits d’harcèlement moral ou sexuel, procède à un licenciement discriminatoire ou consécutif à une action justice en matière d’égalité professionnelle entre les hommes et les femmes, ou encore celui d’un salarié protégé. L’employeur est alors tenu d’octroyer au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois (L'article L.1235-3-1 Code du travail). Le salarié ne peut toutefois prétendre à une indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement (Soc., 23 novembre 2011, n° 09-73.029).  
 

III – Dans quels cas la prise d’acte produit-elle les effets d’une démission ?

 
  • Quels faits ne justifient pas une prise d’acte ?

Lorsque le juge estime que les manquements de l’employeur ne sont pas suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail, il fait produire à la prise d’acte les effets d’une démission (Soc. 30 mais 2010, n° 08-44.236).
 

  • Quels sont les effets d’une démission ?

Lorsque la prise d’acte produit les effets d’une démission, le salarié ne peut ni prétendre aux indemnités de rupture, ni aux indemnités versées par Pôle Emploi. Dans certains cas, le salarié peut même être amené à verser une indemnité à son employeur aux fins de compensation du préavis non exécuté, et ce même en l’absence de preuve de préjudice (Soc. 10 avril 2013, n° 10-13.614).

Exemples : l’absence de visite médicale de reprise qui procédait d’une erreur des services administratifs ne justifie pas une prise d’acte du contrat de travail et produit les effets d’une démission (Soc., 26 mars 2014, n° 12-35.040). De même, le décalage d’un jour ou deux dans le paiement du salaire s’expliquant par des jours fériés ne justifie pas une rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur (Soc., 19 janvier 2005, n°06-45.018).  
 

IV – Que se passe-t-il lorsque la prise d’acte concourt avec d’autres modes de rupture du contrat de travail ?

Il arrive que d’autres modes de rupture du contrat de travail interviennent avant ou après la prise d’acte du contrat de travail par le salarié. Il s’agira ici d’émettre les hypothèses les plus courantes.



 

  • Hypothèse 1 : l’intervention d’un licenciement après la prise d’acte du contrat de travail

Imaginons que le 17 mai 2021 vous prenez acte de la rupture de votre contrat de travail, car votre employeur ne vous a pas versé pas de salaires depuis plusieurs mois. Le 25 mai 2021, votre employeur vous remet une lettre de convocation à un entretien préalable. Le 9 juin 2021, vous êtes licencié pour insuffisance professionnelle.

Dans ce cas, est-ce la prise d’acte ou le licenciement qui est pris en compte ?

Seule la prise d’acte sera prise en compte car elle a été notifiée avant le licenciement (CA Aix-en-Provence, 9ème chambre, 27 septembre 2013, n° 11/16934). Le bien-fondé et de la régularité formelle du licenciement ne seront pas examinés. Seule la qualification de la prise d’acte sera tranchée par les juges (CA Saint-Denis de la Réunion, ch. Soc., 17 mai 2013, n° 12/00206).

 
 

  • Hypothèse 2 : l’intervention d’une prise d’acte à la suite d’un licenciement

Que se passe-t-il dans le cas inverse, lorsque le salarié prend acte de la rupture après avoir été licencié par son employeur ?

Dans ce cas, la prise d’acte effectuée après la notification du licenciement au salarié est inopérante (CA Dijon, soc., 13 juin 2013 n°12/01018). Autrement dit, lorsqu’un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail après avoir été licencié, sa prise d’acte ne sera pas valable. Seul le licenciement sera pris en compte.
 

  • Hypothèse 3 : la prise d’acte intervenant à la suite d’une résiliation judiciaire

La dernière hypothèse est le cas où le salarié prend acte de la rupture, après avoir effectué une résiliation judiciaire. Dans ce cas, le salarié a le droit de procéder dans cet ordre. Seulement, le juge statuera uniquement sur la prise d’acte, car celle-ci entraîne la cessation immédiate du contrat de travail. Il faut cependant savoir que le juge fondera sa décision à la fois sur les manquements invoqués dans la prise d’acte et dans la demande de résiliation judiciaire (Soc., 31 octobre 2006, n°04-46.280).

Vous souhaitez prendre acte de la rupture de votre contrat de travail et vous souhaitez savoir si les faits que vous reprochez à votre employeur justifient une telle rupture ? Le Cabinet ZENOU, avocat en droit social à Paris 20ème met son expertise au service de vos intérêts afin de faire valoir vos droits.

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