La faute grave du salarié : que faire en cas de fait fautif ?

La faute grave du salarié : que faire en cas de fait fautif ?
Zut ! Je ne me suis pas rendu au travail depuis 3 jours, mon employeur va-t-il me licencier ? Tout ce qui est à savoir sur la notion de faute grave se présente dans l’article. A proprement parlé, la faute grave ne possède pas de définition dans le Code du travail, c’est la jurisprudence en droit social qui va alors délimiter les termes de la faute grave.
 
En effet, un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 23 février 2005 définit la notion. La faute grave est celle résultant de tout fait, ou d’un ensemble de faits, non déjà sanctionné, imputable au salarié et constituant une violation de ses obligations découlant de son contrat ou de sa fonction, d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien de l‘employé dans la société concernée pendant la durée du préavis théorique.
 
Cependant, l’exercice d’un droit ou d’une liberté n’est pas constitutif d’une faute, même si celle-ci est reprochée au salarié. L’abus, ou le non-respect d’une restriction justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché pourra constituer une faute grave selon les termes de l’article L.1121-1 du Code du travail.
 
Il est à noter qu’il existe trois degrés de fautes susceptibles de conduire au licenciement à savoir la faute simple, la faute grave et la faute lourde. En effet, une faute grave n’est pas forcément intentionnelle, elle peut résulter tout simplement de l’incapacité du salarié, quelle que soit sa bonne volonté, à fournir un travail exempt d’erreurs, si celles-ci sont graves.
 
Il sera question ici de traiter ce qu’englobe la faute grave (I), ainsi que sur la sanction applicable si une faute grave de votre part est constatée (II). Vous devrez de même connaître les recours possibles afin de contester une décision (III).
 

I. L’appréciation de la faute grave

 
La faute grave va s’apprécier en fonction de la matérialité des faits reprochés par votre employeur. Il existe de nombreux faits qui peuvent constituer une faute grave, chaque cas sera apprécié spécifiquement par le juge prud’homal. On peut tout d’abord citer l’abandon de poste, cela peut constituer une faute grave. Ce sera aussi fréquemment le cas d’une absence prolongée injustifiée, ou de plusieurs absences non-justifiées, mêmes si de courte durée.

Exemple : Partir 5 jours en vacances alors que vous devez contractuellement vous présenter sur votre lieu de travail, constitue une faute grave.
 
La prise de congés payés avant la date de départ officielle, sans autorisation de l’employeur ou dont le retour est reporté à plusieurs reprises, constitue de même une telle faute. Vous devez donc exécuter votre contrat convenu avec votre employeur, le refus d’exécution normal du travail, le refus du salarié d’accomplir la prestation de travail prévue, la réduction volontaire de l’activité, ou la non-conformité à des directives concernant les modalités d’exécution, des tâches tombent aussi sous le coup de la qualification.
 
L’affaire Baby-Loup démontre parfaitement une situation de refus, d’appliquer les directives de l’employeur respectant le droit, en l’espèce le refus de retirer un voile islamique, alors que la mesure est justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché selon les termes de la Cour de cassation en assemblée plénière, dans son arrêt du 25 juin 2014.
 
Il est d’usage d’inclure également dans la qualification les refus de prise en compte, des demandes de changements voulus par l’employeur. En effet, le refus non-justifié d’effectuer des heures supplémentaires, celui de changer les horaires alors qu’il n’y a pas modification du contrat, de rédiger des rapports commerciaux et l’omission d’appliquer une clause de mobilité, c’est-à-dire une mutation géographique contractuellement prévue, sont impérativement à proscrire.
 
Le refus de l’autorité, de la subordination, est généralement sujet à débat, mais peut aussi constituer une faute grave pour un salarié, en raison des difficultés relationnelles ou d’un comportement négligeable. La faute grave est parfois caractérisée d’office, dès lors que les faits s’avèrent être d’une gravité si conséquente que cela justifie un licenciement immédiat, particulièrement si vous avez recours à la violence morale ou physique.

Exemple : Gifler un collègue de travail, insulter son employeur, faire des commentaires obscènes, ou proférer des menaces, sont de fait des fautes graves.
 
Par ailleurs, le refus de votre part des règles de l'entreprise, ou un manquement au respect des obligations d’hygiène et de sécurité, peut constituer une faute grave, et particulièrement le cas actuellement en raison de la pandémie COVID-19.

Exemple : Le non-port du masque dans le secteur médical est sévèrement sanctionné.
 
De même, la jurisprudence a reconnu que des accidents responsables étaient constitutifs, d’une faute grave dans le cadre de certaines professions, et ce même en dehors des horaires de travail mais en lien avec l’emploi. Exemple : En l’espèce, un chauffeur de poids lourd en état d’ivresse et causant un accident.
 
Il a aussi été rapporté que l’utilisation abusive d’internet au travail, dans un usage à titre personnel pourrait conduire à un licenciement pour faute grave. Exemple : La consultation de sites pornographiques sur le lieu de travail.
 
Le vol, le détournement de fond au travail, sont constitutifs d’une telle faute. Ce sont généralement des problèmes relevant d’un manque d’honnêteté de la part du salarié, même extérieur à l’entreprise, mais ayant une répercussion, qui entraîne un licenciement pour faute grave.
 

II. La sanction en cas de faute grave

 
Dès lors que vous commettez un tel manquement aux règles, la sanction applicable est généralement un licenciement pour faute grave.
 
Il est possible pour vous de faire, avant toute chose, l’objet d’une mise à pied conservatoire. L’employeur doit, non seulement se justifier d’une cause réelle et sérieuse de licenciement, mais également d’une faute d’une gravité telle qu’il doit se séparer immédiatement du salarié, pour ne pas entraver le bon déroulement des activités de l’entreprise. La faute grave n’est pas une faute lourde, qui elle est en principe intentionnelle et a de graves conséquences pour l’employeur ainsi que pour vous, car prive le salarié de toute indemnité liée au licenciement.
 
La faute grave doit être prouvée par l’employeur, car en cas de doute cela profite toujours au salarié comme le dispose l’article L.1235-1 du Code du travail. Cela est nécessaire car c’est le motif qui justifie le licenciement pour motif de faute grave. L’employeur ne peut pas vous licencier pour faute en utilisant un autre motif, comme un licenciement économique, car il doit motiver et caractériser la faute.
 
L’employeur doit vous envoyer une convocation à un entretien préalable, par lettre recommandé avec accusé de réception, datée au minimum 5 jours après la réception du courrier. Il doit vous expliquer les motifs de la décision envisagée et vous laisser le droit de vous expliquer sur votre comportement fautif. Par la suite, l’employeur doit attendre au minimum 2 jours pour notifier sa décision.
 
Le licenciement pour faute grave entraîne votre départ immédiat et la rupture de votre contrat de travail. A titre de validité, ce type de licenciement doit suivre une procédure réglementée par le Code du travail et contrôlée par le Conseil des prud’hommes. Néanmoins, vous ne pouvez pas toucher d’indemnité légale de licenciement, ni d’indemnité compensatrice de préavis en cas de licenciement pour faute grave. Les seules indemnités que vous pourrez toucher sont celles de congés payés et de l’assurance chômage.
 
Pour ce qu’il s’agit du délai de préavis, c’est-à-dire la période précédant la rupture du contrat de travail durant laquelle celui-ci est maintenu dans toutes ses dispositions, vous ne pourrez bénéficier d’aucune indemnité de préavis. Toutefois, sauf dans certains cas, vous effectuez un préavis et cette période peut faire l’objet d’une indemnité à la fin du contrat.
 
Dans le cas du licenciement pour faute grave, vous bénéficiez donc des indemnités de congés payés, correspondant aux congés non pris avant la rupture du contrat de travail.  Vous avez aussi la possibilité de prétendre à l’assurance chômage et percevoir les allocations attachées au régime des demandeurs d’emploi.
 
De plus, d’autres dispositions plus avantageuses, peuvent être indiquées dans la convention collective. Parfois, une indemnité de licenciement peut effectivement être prévue, et dans ce cas lesdites dispositions prévalent sur les règles générales d’indemnisation précitées.
 

III. Les recours envisageables

 
Il existe des méthodes pour contester la faute grave, ainsi que le licenciement y découlant. De prime abord, vous pouvez contester la matérialité des faits avérés, par exemple en rapportant des témoignages de collègues, ou en précisant que les faits reprochés ne sont pas réprimandés par la législation travailliste.
 
Par conséquent, une telle rupture du contrat de travail est contestable, il est de la compétence du Conseil de prud’hommes de juger si le licenciement pour faute grave est fondé. Le juge peut alors requalifier le licenciement en licenciement pour faute simple, voire annuler ce motif et prononcer un licenciement sans cause réelle ni sérieuse.
 
Dans les deux cas, vous pouvez prétendre à une réparation en raison du préjudice subi. Vous devez en effet savoir qu’il vous incombe d’apporter la preuve de l’absence de cause réelle et sérieuse du licenciement, ou de rapporter des irrégularités dans la procédure. Un vice de procédure peut entrainer de même une indemnisation supplémentaire.
 
Par ailleurs, les montants d’indemnisations ont été réduits depuis 2017, par la mise en place du barème Macron. En effet, les indemnités attribuées à un salarié pour un licenciement sans cause réelle et sérieuse sont plafonnées en fonction de son ancienneté. Un salarié justifiant de trois années d'ancienneté, ne peut obtenir plus de 3,5 mois de salaire. Après dix ans de présence, il ne peut obtenir plus de 10 mois de salaire.
 
Le barème Macron est très critiqué par la doctrine, car il est estimé que le montant maximal d’indemnisation, prévu par l’article L1235-3 du Code du travail, en raison de son inconventionnalité, viole les dispositions de l’article 24 de la Charte sociale européenne, les articles 4 et 10 de la convention 158 de l’Organisation internationale du travail et le droit au procès équitable.
 
Le Cabinet Zenou peut en conséquence demander une meilleure indemnisation, plus que ce qui est prévu par le barème. Maître Johan ZENOU, expert dans la défense du salarié, prendra fait et cause dans votre contestation d’une faute grave reprochée par votre employeur. Maître Zenou avocat en droit social à Paris 20ème vous propose de vous accompagner dans vos démarches.

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